DOSSIER

FEMMES ET LOGEMENT COMMUNAUTAIRE

Le milieu du logement social et communautaire, par son caractère collectif et la solidarité que permet son mode d’organisation, est appelé à jouer un rôle clé pour offrir un milieu sain aux femmes, pour qui il est globalement plus difficile d’accéder à un logement adéquat ou même de le conserver.

Les OSBL d’habitation favorisent la participation et l’empowerment de leurs locataires femmes, qui sont invitées à participer aux assemblées générales de l’organisme, au conseil d’administration ou au comité de locataires, autant de lieux où elles peuvent faire valoir leurs intérêts et acquérir un plus grand pouvoir sur les décisions qui les concernent.

Parmi les 54 500 logements offerts en OSBL d’habitation partout dans la province, les femmes sont majoritaires. Elles représentent :

[piechart size= »7″ style= »piechart2″ percent= »63″ color= »#dc8633″ text= »de l’ensemble des locataires en OSBL-H » class= »#graph »]
[piechart size= »7″ style= »piechart2″ percent= »72″ color= »#dc8633″ text= »de l’ensemble des locataires en OSBL-H pour personnes aînées » class= »#graph »]

Cette présence majoritaire de femmes locataires en OSBL-H est en concordance avec les observations faites partout au Canada, où les logements subventionnés sont occupés par une proportion plus élevée de femmes, en comparaison avec les logements non subventionnés.

Cependant, en dépit des efforts consentis par les groupes, l’offre de logement en OSBL est toujours insuffisante pour répondre adéquatement à des besoins croissants.

* Les sources des données sont indiquées en référence sur la version en ligne de ce document.

Les femmes : structurellement plus pauvres que les hommes

Les inégalités entre les femmes et les hommes sont toujours présentes dans notre société et elles affectent directement les conditions d’habitation des femmes et de leurs enfants. Leur plus faible capacité de payer le loyer explique le fait qu’un grand nombre d’entre elles ont de la difficulté à trouver un logement qui convienne à leurs besoins.

En contexte de pénurie de logements abordables touchant tous les ménages à faible revenu, l’ensemble des indicateurs montrent que les ménages avec des femmes comme principal soutien financier ont un taux d’effort médian qui dépasse presque toujours celui des hommes. Cet écart s’accroît au fur et à mesure qu’elles avancent en âge et ce, qu’elles soient propriétaires ou locataires, qu’elles occupent de grands ou de petits logements, qu’elles vivent seules ou en famille et qu’elles habitent dans un milieu rural ou urbain.

De fait, les femmes sont plus touchées que les hommes par les difficultés d’accès à un logement en raison de leur plus grande pauvreté. Conséquemment :

Elles consacrent une part plus importante de leur revenu pour se loger :

Elles sont plus nombreuses à être locataires (51 %) que les hommes (32 %).

Elles sont plus nombreuses à occuper des emplois à temps partiel, précaires ou non syndiqués (509 500) que les hommes (304 800). Le revenu médian de l’ensemble des femmes québécoises, tant locataires que propriétaires, correspond à seulement 68% de l’ensemble des hommes québécois (22 900$ contre 33 800$).

Elles sont plus nombreuses à effectuer des tâches domestiques, à prodiguer des soins et à remplir leurs obligations familiales (Statistique Canada [2017], Enquête sur la population active).

Elles sont plus nombreuses à être cheffes de famille monoparentale. Dans un contexte où le coût des loyers augmente plus rapidement que l’Indice des prix à la consommation (IPC), il est de plus en plus difficile pour ces femmes de pouvoir assumer seules un logement suffisamment grand pour plus d’une personne.

Les femmes aînées : toujours plus vulnérables

Même si les inégalités se sont considérablement amenuisées depuis 40 ans, la situation économique des femmes âgées de 65 ans et plus demeure plus précaire que celle des hommes du même groupe d’âge. Alors qu’elles représentent 72 % de l’ensemble des locataires en résidence pour personnes âgées, elles sont plus susceptibles de vivre en situation de pauvreté en vieillissant car :

› Elles ont accès à moins de revenus de retraite en raison de leur salaire moins élevé lorsqu’elles étaient sur le marché du travail ou en raison des années passées à la maison pour s’occuper des enfants et des tâches domestiques.

› Elles vivent plus souvent seules (31 %) que les hommes (16 %) (Statistique Canada [2016], Conditions de logement des ménages âgés au Canada.) Le contraste est encore plus saisissant à mesure que l’on avance dans les tranches d’âge, car 92 % des femmes âgées de 85 ans et plus demeurant en résidence vivent seules, comparativement à 70 % des hommes de cette tranche d’âge. En raison de leur espérance de vie plus élevée (84,5 ans) que celle des hommes (80,6 ans), elles sont particulièrement touchées par l’appauvrissement lié aux coûts des soins et des services qui augmentent avec l’âge.

Bien que les femmes aînées souhaitent, comme leurs homologues masculins, rester dans leur domicile le plus longtemps possible, certains indicateurs témoignent de leurs difficultés à le faire :

Les ménages âgés ayant des besoins impérieux en matière de logement sont majoritairement composés de femmes vivant seules.

Plus de la moitié des femmes aînées locataires consacrent 30 % et plus de leur revenu au loyer, comparativement à moins du tiers des hommes aînés.

Elles disposent d’un revenu annuel 29 % plus faible que les hommes du même âge. Cet écart se creuse chez les femmes locataires et âgées de 75 ans et plus, pour qui les revenus annuels sont 37 % plus faibles que celui des ménages soutenus par un homme du même âge.

Les femmes seules, immigrantes, autochtones et en situation de handicap : particulièrement touchées par la pénurie de logements abordables

Les femmes seules, immigrantes ou autochtones sont confrontées à des difficultés supplémentaires pour accéder à un logement abordable et sécuritaire parce qu’elles sont davantage discriminées et marginalisées.

Plus de la moitié des Québécoises vivant seules consacrent plus de 30 % de leur revenu au loyer et le quart, plus de 50 %, comme le montre l’illustration suivante :

Les femmes locataires vivant seules ont un revenu annuel de 16 % inférieur à celui de leurs homologues masculins (20 064 $ contre 23 861 $). 

Les femmes immigrantes paient près de 12 % plus cher pour se loger que les femmes non immigrantes. Pour se trouver du logement ou du travail, les femmes immigrantes subissent une double discrimination : en tant qu’immigrantes et en tant que femmes. D’ailleurs, il n’est pas rare que malgré leur haute qualification, elles se retrouvent à occuper des emplois à faibles salaires et à subir des conditions de travail difficiles.

À l’instar des femmes immigrantes, les femmes autochtones et inuites sont la cible d’une double discrimination pour accéder à un logement en milieu urbain, et ce, même si la loi sanctionne de telles pratiques. De plus, parmi la population autochtone en situation d’itinérance, les femmes sont proportionnellement plus nombreuses que les hommes.

Les femmes en situation de handicap sont confrontées, tout au long de leur vie, à une pénurie de logements adaptés. Plus pauvres que les hommes en situation de handicap (le tiers d’entre elles vivant sous le seuil de pauvreté), l’accès au marché du travail leur est plus difficile.

Plus qu’un logement, les OSBL d’habitation offrent un milieu de vie

Plus que du logement abordable, les OSBL d’habitation offrent un milieu de vie favorisant l’entraide, la sécurité et l’esprit de communauté notamment par le biais de services tels que:

Les activités de soutien communautaire en logement social permettent de répondre aux besoins de sécurité, de médiation et d’animation des locataires vulnérables. En plus de favoriser la stabilité résidentielle et la responsabilité des locataires, ces activités sont un moyen d’aborder certaines problématiques, dont la violence et le harcèlement, notamment envers les femmes.

Le travail de milieu pour aînés, mis en place par certains OSBL, est un service gratuit et confidentiel qui a pour but d’aller à la rencontre de personnes aînées de la communauté afin de prévenir et de détecter leur sentiment d’isolement ou de détresse, un deuil, de la violence ou de la maltraitance (économique, physique, psychologique et sexuelle). Les travailleurs et travailleuses de milieu servent ainsi de pont entre les personnes aînées et les ressources, communautaires comme institutionnelles, qui existent dans leur quartier et leur municipalité.

Une partie des OSBL d’habitation sont des maisons hébergement de 1re et 2e étapes réservées aux femmes en difficulté ou victimes de violence conjugale.

» Présentes partout sur le territoire québécois, les maisons d’hébergement offrent des services gratuits et confidentiels d’hébergement sécuritaires (dont la durée de séjour varie de quelques semaines à trois mois), mais également de l’écoute téléphonique, de l’information, du soutien et de l’accompagnement.

» Les maisons de 2e étape permettent de répondre aux besoins des femmes (accompagnées de leurs enfants) qui décident de quitter définitivement un conjoint violent par une offre de logements sécuritaires et une gamme de services spécialisés. La durée moyenne de séjour est d’un an, mais peut atteindre deux ans. Selon une analyse des besoins effectuée en 2016, il manque environ 100 logements transitoires au Québec pour soutenir ces femmes et ces enfants.

Répondre aux besoins des femmes vivant en OSBL d’habitation : une priorité

Puisque en général elles représentent la majorité de leurs locataires, bon nombre d’OSBL d’habitation ont engagé des actions pour répondre aux besoins spécifiques de celles-ci, notamment :

Le maintien d’un climat de confiance, de sécurité, d’entraide et de solidarité;

La mise en place, par des personnes intervenantes, des gestionnaires ou des bénévoles, d’une approche globale et orientée vers l’autonomie des femmes;

La création d’espaces d’échanges non mixtes (ex. par le biais d’activités de soutien communautaire réservées aux femmes) qui favorisent l’engagement citoyen et la mobilisation;

L’accessibilité à des outils d’éducation populaire;

Le développement de services d’intervention accessibles, notamment par le biais de référencement vers des organismes communautaires partenaires (ex. centres de femmes, centre d’aide et de lutte contre les agressions à caractère sexuel, organismes de réinsertion professionnelle et académique, etc.).

Dans une optique de promotion de l’égalité entre les femmes et les hommes, le secteur du logement communautaire améliore sans cesse les connaissances et la prise en compte des besoins particuliers des femmes locataires, afin de soutenir les organismes qui souhaitent bonifier leur offre de services et d’activités.

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L’ENJEU

Les femmes sont particulièrement touchées par la pénurie de logements sociaux et communautaires, davantage si elles sont aînées, immigrantes, en situation de handicap ou autochtones.

Les logements sociaux et communautaires permettent de répondre à une partie des besoins en logement des ménages soutenus par une femme, comme le démontre le fait qu’une majorité de femmes y habitent.

Les OSBL d’habitation offrent non seulement des logements abordables, mais également un milieu de vie où des pratiques sont mises en place pour assurer le bien-être et la sécurité des femmes, comme le soutien communautaire en logement social ou le travail de milieu pour les personnes aînées.

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LE PROBLÈME

Les femmes sont structurellement plus pauvres que les hommes :

» Elles sont plus nombreuses à consacrer plus de 30 % de leur revenu pour payer le loyer lorsqu’elles sont le principal soutien financier du ménage;

» Elles sont plus nombreuses à consacrer plus de la moitié de leur revenu pour payer le loyer lorsqu’elles vivent seules.

» La pauvreté des femmes tend à s’accroître avec l’âge. En effet, bien que les femmes aînées souhaitent, comme leurs homologues masculins, rester chez elles le plus longtemps possible, elles éprouvent beaucoup plus de difficultés à le faire en raison de leur faible revenu et des coûts des services qui augmentent avec l’âge.

La précarité économique des femmes aggrave leurs conditions de santé, de sécurité et de bien-être.

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CE QUE NOUS PROPOSONS

 Lancer sans délai un vaste programme permettant de réaliser au moins 5000 nouveaux logements communautaires par année, adaptés aux besoins spécifiques des ménages à faible revenu, et adopter des mesures favorisant la stabilité du parc de logements sociaux existant.

Assurer la pérennité du financement de pratiques favorisant la stabilité résidentielle, la sécurité et le bien-être des locataires (soutien communautaire en logement social, travail de milieu pour les personnes aînées, etc.).

Doubler le nombre d’unités d’hébergement de 2e étape au Québec, pour améliorer, de manière équitable, l’accessibilité aux services de post-séparation pour les femmes et les enfants victimes de violence conjugale.

ACTUALITÉ DU DOSSIER

Revue-de-presse - RQOH

Le logement dans l’actualité québécoise. Notre revue de presse explore les sujets qui ont retenu l’attention.

Le RQOH déplore que le gouvernement du Québec refuse de s’attaquer sérieusement à la crise du logement dans son budget 2024-2025.

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Visuel du Collectif 8 mars. Marianne Chevalier et Natalie-Ann Roy. Agence : Belvédère coop.

En cette Journée internationale des droits des femmes, les inégalités sociales subsistent et le logement communautaire peut les contrer.