Femmes en OSBL d’habitation

Introduction

Les femmes sont majoritaires parmi les locataires d’OSBL d’habitation en général, et encore plus dans les résidences communautaires pour aînés. Le constat est le même lorsque l’on s’intéresse aux employés : les emplois en OSBL d’habitation sont à 70% occupés par des femmes.

Le RQOH a pris l’initiative, à partir de ces premières données, d’amorcer une réflexion sur la situation et les besoins des femmes habitant et travaillant en OSBL d’habitation. Un comité de travail « Femmes en OSBL d’habitation » a donc été créé, comprenant des personnes gestionnaires, employées ou administratrices d’OSBL, déléguées par les fédérations régionales. Si vous souhaitez participer à ce comité, contactez votre fédération régionale ou le RQOH.

Dans une optique de promotion de l’égalité entre les femmes et les hommes, le but est d’améliorer les connaissances et la prise en compte des besoins spécifiques aux femmes locataires, afin de bonifier l’offre de services et d’activités. Il s’agit aussi d’en savoir plus sur la situation des employées et des bénévoles.

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Une approche différenciée pour des besoins spécifiques

Sur les 1200 OSBL d’habitation du réseau, à peine plus d’une centaine sont non mixtes et n’accueillent que des femmes. On peut donc affirmer que les femmes habitant ou travaillant en OSBL d’habitation évoluent principalement dans un milieu mixte. Or, une mesure qui semble neutre peut produire des effets différents sur les femmes et sur les hommes, car elles et ils vivent des réalités sociales et économiques différentes comme le démontre le présent dossier. D’ailleurs, lors de la dernière assemblée générale du RQOH, des acteurs et actrices sur le terrain, gestionnaires et intervenant-e-s, se sont entendus pour affirmer qu’il existe des besoins différents entre les hommes et les femmes,

Par conséquent, pour répondre efficacement aux besoins et favoriser l’égalité, il apparaît pertinent et important de favoriser une approche différenciée selon les sexes, qui prend en considération les besoins spécifiques aux femmes. Par exemple, des OSBL d’habitation qui offrent des logements à des femmes et des hommes à risque d’itinérance ont mis en place des espaces de vie non mixtes, pour répondre au besoin de sécurité exprimé par les femmes, tout en proposant des lieux (cuisine, salle commune) ouverts à tous.

Pourquoi les femmes sont-elles majoritaires en OSBL d’habitation ?

Plusieurs facteurs permettent d’expliquer cette majorité de femmes locataires en OSBL-H. Il s’agit en outre d’une réalité dans tout le Canada, puisque les logements subventionnés sont occupés par une proportion plus élevée de femmes, par rapport aux logements non subventionnés.

L’un des facteurs est que les femmes sont plus susceptibles de vivre en situation de pauvreté, car elles sont moins rémunérées, en moyenne au Québec, que les hommes. Les raisons sont connues : elles sont plus nombreuses que les hommes à occuper des emplois à temps partiel, précaires, non syndiqués, et à s’occuper des tâches domestiques et des responsabilités de proches aidants. Un autre point à noter : 51% des femmes sont locataires, comparativement à 32,5% des hommes. Sans oublier que les chefs de famille monoparentales sont bien plus souvent des femmes (78%) que des hommes, et la situation de ces familles est souvent précaire.

Pour toutes ces raisons, les femmes se heurtent à de plus grandes difficultés pour se loger, comme le montre le graphique suivant :

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Les femmes représentent 72% des locataires en OSBL-H pour aînés

Les femmes aînées vivent plus longtemps et plus souvent seules que les hommes, et comme leurs homologues masculins, elles souhaitent rester chez elle le plus longtemps possible. Mais elles ont plus de difficultés à demeurer à la maison : 54% des aînées consacrent plus du tiers de leur revenu au loyer, comparativement à 31% des hommes âgés, ce qui explique surement leur forte présence dans les résidences communautaires ou privées.

Encore aujourd’hui, la situation économique des femmes âgées est plus précaire que celle des hommes du même âge, même si les inégalités ont drastiquement diminué depuis 40 ans. Les données de Statistique Canada montrent que les femmes continuent d’être plus susceptibles de vivre en situation de pauvreté en vieillissant, car elles ont accès à moins de revenu de retraite. Ainsi, en 2006, les femmes âgées représentaient près de 75 % du groupe de personnes aînées vivant avec un revenu inférieur à 20 000 $ au Canada.

En 2013, les femmes de 65 ans et plus disposent d’un revenu 29% plus faible que celui des hommes du même âge (23 000 $ par rapport à 32 300 $). Si l’on s’intéresse aux ménages locataires et plus âgées, on remarque en 2011 que le revenu d’un ménage locataire soutenu par une femme de 75 ans et plus est en moyenne de 20 071 $, ce qui est 37% plus faible que celui des ménages soutenus par un homme du même âge : 31 936 $.

Femmes seules, femmes immigrantes et femmes autochtones : encore plus vulnérables

D’après l’Enquête nationale auprès des ménages de 2011, plus de la moitié des femmes vivant seules consacrent plus de 30% de leur revenu au loyer, et le quart plus de 50% (voir graphique ci-contre). Les femmes locataires sont un peu plus nombreuses que les hommes à vivre seules, et lorsque c’est le cas, elles ont un revenu annuel 16 % inférieur à celui des hommes vivant seul, en moyenne (23 861 $ pour les hommes, 20 064 $ pour les femmes).

Les ménages issus de l’immigration ont des difficultés économiques plus importantes que les autres, encore plus s’ils ont une femme comme principal soutien financier. Les immigrantes paient en moyenne 11% de plus pour se loger que les femmes non-immigrantes. Les femmes immigrantes subissent une double discrimination, pour trouver un logement mais aussi du travail, en tant qu’immigrantes ET en tant que femmes. Il n’est pas rare que des immigrées hautement qualifiées se retrouvent à occuper des emplois à faibles salaires et aux conditions de travail difficiles.

Enfin, rappelons que les communautés autochtones vivent une grave crise du logement. Ainsi, 20% des Premières Nations, Métis, et Inuits habitent dans un logement qui a besoin de réparations majeures. En comparaison, seulement 6% de la population non autochtone vit dans de telles conditions.Presque la moitié des logements du territoire inuit du Nunavik, le Nord-du-Québec, sont de tailles insuffisantes, les ménages vivant en situation de surpeuplement. Les conditions de vie difficiles dans les réserves provoquent le départ vers les villes des membres des Premières Nations et des Inuits, qui résident désormais majoritairement en milieu urbain. Dans les villes québécoises, la discrimination raciale à l’encontre des femmes Autochtones et Inuits pour accéder à un logement est une réalité, même si la loi sanctionne de telles discriminations. Comme les immigrantes, elles sont la cible d’une double discrimination, comme femmes et Autochtones. Il n’est pas anodin de constater que les femmes constitue la grande partie de la population autochtone vivant une situation d’itinérance à Montréal, plus que chez la population itinérante en général. Enfin, Statistique Canada indique que le taux d’agressions sexuelles chez les femmes autochtones est trois fois plus élevés que celui observé chez les femmes non autochtones, au Canada.

En OSBL d’habitation, il peut sembler anodin voire inutile de spécifier à une personne nouvellement locataire ou employée, par exemple au moment de la signature du bail ou du contrat, qu’aucune forme de harcèlement ou de violence ne saurait être toléré au sein de l’organisme. Pourtant, une telle mesure, entre autres, pourrait faire toute la différence pour les femmes. Rappelons que les victimes de harcèlement, d’agression sexuelle, ou encore de violence conjugale, sont en majorité des femmes, et que ces violences peuvent toucher les femmes jusque chez elles. De nombreux témoignages recueillis par les centres de femmes attestent de cette triste réalité, c’est la raison pour laquelle une campagne a été lancée, qui appelle notamment les gestionnaires de logements sociaux et communautaires à mettre en place des mécanismes permettant de prévenir et combattre ces violences.

Pour soutenir cette campagne, le RQOH souhaite produire un guide à l’intention des gestionnaires d’immeubles, qui comprendra des éléments de sensibilisation à propos de ce phénomène et rassemblera les moyens pouvant être mis en place pour y faire face, ainsi que les ressources disponibles auxquelles référer les éventuelles victimes. Il est d’ores et déjà certain que le soutien communautaire en logement social, qui inclut un travail de référencement et d’écoute, fait partie des mécanismes identifiables de prévention.

Une femme aînée vivaient une situation de maltraitance dans 70% des cas, sur l’ensemble des appels reçus par la Ligne Aide Abus Aînés entre 2010 et 2016, comparativement à 24 % pour un homme aîné. Bien que la maltraitance envers les personnes aînées n’épargne aucun genre, certains types de maltraitance semblent plus fréquemment vécus par des femmes. Il existe ainsi un risque accru de violence sexuelle, mais aussi familiale, ou conjugale, auquel les femmes sont confrontées pendant leur vie. Au Québec, les femmes aînées victimes de violence familiale dont la situation a été déclarée à la police représentaient 65 % des victimes, contre 35 % d’hommes pour ce même type de violence.

Le 8 mars 2018, Journée internationale des femmes, le RQOH se positionne naturellement en agissant pour la reconnaissance des droits des femmes ainsi qu’à l’atteinte de rapports égalitaires et sécuritaires dans leurs milieux de vie en lançant officiellement le Guide pour prévenir les violences et le harcèlement envers les femmes en OSBL d’habitation.

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Un besoin de sécurité pour les femmes à risque d’itinérance

La violence est un facteur déterminant pour les femmes à risque ou en situation d’itinérance. Les femmes en général sont davantage touchées par le harcèlement, les violences domestiques ou les violences sexuelles, mais c’est encore plus vrai pour celles qui ont connu la rue. Des études au Canada et au Québec indiquent donc que l’un des besoins les plus marquants pour ces dernières en est un de sécurité. Dans cette optique, des OSBL d’habitation qui offrent des logements à des femmes et des hommes à risque d’itinérance ont pris l’initiative de réserver des espaces de vie non mixtes, pour répondre à ce besoin spécifique aux femmes, tout en proposant des lieux (salle commune ou cuisine) ouverts à tous.

Complexe, diversifiée et souvent invisible, l’itinérance des femmes est plus difficile à mesurer que celle des hommes, car elles évitent le plus possible d’affronter la brutalité de la rue, quitte à subir des situations de violences et d’abus. Cependant, une majorité d’organismes intervenant auprès de ces dernières s’entendent pour affirmer qu’elles représentent au moins de 30 à 40% des personnes en situation d’itinérance. En outre, depuis plusieurs années, les ressources d’hébergement d’urgence sont débordées : en 2014, le taux d’occupation des lits dans les hébergements d’urgence réservés aux femmes (130 lits) a été de 103,9%, comparativement à 85,7 % dans ceux pour les hommes (1133 lits).

Depuis des années, les groupes de femmes, appuyées par des groupes de défense du droit au logement, sonnent l’alarme quant à l’augmentation et à la complexification de l’itinérance au féminin. Le logement social avec soutien communautaire est une solution durable pour assurer la stabilité résidentielle des femmes, comme le démontrent de nombreuses publications, dont la Déclaration sur l’itinérance des femmes. Cette Déclaration, ratifiée par le RQOH, met en lumière la diversité de l’itinérance au féminin, et la nécessité de financer le logement social avec soutien communautaire.

La situation des femmes employées et bénévoles en OSBL d’habitation

Une enquête réalisée en août 2015 par le RQOH montre que comme employeurs, les OSBL d’habitation embauchent directement plus de 6 500 personnes, même si la gestion par les bénévoles est la plus fréquente. Comme dans l’ensemble du secteur de l’économie sociale et de l’action communautaire, les emplois en OSBL-H sont à 70% occupés par des femmes, hormis pour les postes de concierge et de coordonnateur/directeur. De plus, les taux horaires des hommes se révèlent nettement plus élevés que ceux des femmes, et ce, que le poste soit occupé à temps plein ou à temps partiel (de 2 à 5 $ de différence sur le salaire horaire). Cette enquête ne permettait pas d’expliquer clairement ces écarts importants.

« Dans le cas du poste de concierge, cet écart pourrait s’expliquer par une plus grande reconnaissance des tâches impliquant des travaux lourds. Cet écart pourrait, par ailleurs, s’expliquer par la plus grande ancienneté des employés concernés. Un coordonnateur d’OSBL d’habitation nous a également mentionné le fait que les exigences salariales des hommes sont souvent plus élevées, ce qui peut expliquer pourquoi on les retrouve peu dans ce secteur. »

En revanche, sur les conseils d’administration, la parité est en moyenne de mise. Cependant, les postes de présidence et de vice-présidence sont plus souvent occupés par des hommes, tandis que les femmes sont plus nombreuses à se consacrer à la trésorerie, au secrétariat, ou à la simple administration (informations extraites de la base de données du RQOH).