2 mars 2020

30 millions $ pour le soutien communautaire en logement social

Ce lundi 2 mars, une quinzaine de personnes œuvrant dans les domaines du logement social et de la lutte à l’itinérance ont remis au ministère de la Santé et des Services sociaux plus de 1200 cartes postales signées par des locataires, des intervenant·es, des gestionnaires et des bénévoles de projets de logement de partout au Québec.

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Avec la campagne « 4 murs ce n’est pas assez », le Réseau d’aide aux personnes seules et itinérantes (RAPSIM), la Fédération des OSBL d’habitation de Montréal (FOHM) et le RQOH réclament un investissement de 30 M$ annuellement en soutien communautaire en logement social (SCLS). La délégation qui s’est rendue au siège du MSSS à Montréal était accompagnée de M. Andrés Fontecilla, député de Laurier-Dorion et porte-parole de Québec solidaire en matière de logement.

Depuis plus de 30 ans, nous développons au Québec des logements sociaux avec soutien communautaire, une formule qui a fait ses preuves et qui est reconnue par le gouvernement. « On parle quand même de plus de 180 000 logements sociaux qui sont opérés et gérés au Québec. Le soutien communautaire en logement social c’est l’approche qui peut faire toute la différence et qui peut contribuer au maintien des personnes qui vivent en logement social. Sans cette aide, c’est carrément des gens qui peuvent se trouver à la rue », a déclaré Chantal Desfossés, directrice générale du RQOH.

Dans le cadre de la prise de parole devant le siège du MSSS, Mme Manon Blanchard, qui est coordonnatrice des Habitations du Réseau de l’Académie, un OBNL d’habitation situé sur le Plateau Mont-Royal, a eu l’occasion de faire une excellente présentation sur ce qu’est le soutien communautaire en logement social et sur son nécessaire financement. Nous reproduisons ici l’intégralité de son allocution.

Notre organisme existe depuis plus de 30 ans et permet à 170 personnes seules et autonomes vivant des problèmes de santé mentale et ayant connu l’itinérance d’avoir enfin un logement permanent qui correspond à leurs besoins, les sortant ainsi du rituel de la porte tournante : la psychiatrie, la rue, les ressources d’hébergement.

Préoccupés par les besoins criants en logements sociaux, les administrateurs et administratrices ont poursuivi le développement durant toutes ces années. Nous avons maintenant sept (7) immeubles presque tous situés sur le Plateau Mont-Royal.

À l’origine, le soutien aux locataires était offert par des personnes bénévoles expérimentées et qualifiées, entre autres certains membres du conseil d’administration.

Par la suite, graduellement et ce, jusqu’en juin 2018, nous avons eu une seule intervenante qui accordait le soutien communautaire aux résidents de nos milieux de vie, travaillant en collaboration avec les ressources externes (travailleurs sociaux des hôpitaux et intervenants d’organismes œuvrant en santé mentale) selon une approche d’empowerment, afin de créer un climat harmonieux et procurer un support aux locataires pour qu’ils se maintiennent en logement. Écoute, référence, support pour faire son budget, gestion de conflits entre voisins, organisation de projets collectifs tels que des soupers communautaires, des cafés-causeries, des jardins communautaires, on peut rapidement comprendre qu’une seule intervenante pour l’ensemble de nos locataires ne répondait pas à la totalité des besoins exprimés. Pour illustrer le manque à gagner, en 2007 le soutien communautaire pour toutes les résidences de l’organisme était financé à la hauteur de 932 $ par logement. En 2017, c’était 549 $ par logement qui était octroyé au soutien communautaire, pour une baisse de 41 %, le nombre de logements étant passé de 75 logements à 170 en 10 ans.

Et puis, roulement de tambour! À la suite des appels de projets, en juin et octobre 2018, notre organisme a vu son financement pour le soutien communautaire bonifié par des enveloppes spécifiques en santé mentale et en itinérance. L’une étant récurrente et l’autre pour 3 ans avec des conditions propres à chacune, mais exigeant la réservation d’unités de logement.

Nous avons pu alors ajouter deux intervenantes en soutien communautaire à notre équipe, faisant une grande différence dans la stabilité résidentielle des locataires et leur qualité de vie. Concrètement, cela s’illustre par une présence accrue de nos intervenantes dans chacun des milieux. Par exemple, nous avons pu affecter une intervenante exclusivement à notre milieu le plus populeux, soit 56 personnes. Elle peut maintenant prendre plus de temps pour accueillir les nouveaux locataires, se consacrer davantage aux personnes vivant des épisodes difficiles, limitant ainsi le nombre de départs, volontaires ou non. Sa présence amplifiée anime la vie collective, par un projet de ruelle verte par exemple, et permet de briser l’isolement.

Enfin, on pourrait croire que les ressources humaines sont maintenant suffisantes aux Habitations du Réseau de l’Académie, trois intervenantes pour 170 locataires, un ratio de 56 personnes par intervenante. Il importe de se rappeler que l’un de ces financements est pour 3 ans. Et que tout cela est conditionnel à des ententes.

Et aussi, comme le développement de logements sociaux est encore plus que jamais une priorité, pensons à la crise du logement qui se dresse devant nous, nous travaillons présentement à une 8e phase, le projet Jean-Brien, en hommage à un des fondateurs de l’Académie. D’ici l’automne 2021, vingt nouvelles personnes trouveront un chez-soi qui conviendra à leurs besoins, un logement social avec soutien communautaire.

Par contre, encore ici, aucun financement en soutien communautaire n’est attaché au développement de ce nouveau projet. Si on souhaite que des organismes à but non lucratif comme le nôtre poursuivent le développement d’habitations sociales et communautaires, il faudra bien qu’on finance adéquatement ce qui a été reconnu comme un élément essentiel par le Cadre national de référence signé par le MSSS et la SHQ en 2007 : le soutien communautaire pour les personnes et les collectivités vivant en logement social.