C’est par un simple communiqué diffusé en fin de journée le 5 mai dernier qu’a été lancé le nouveau Cadre de référence sur le soutien communautaire en logement social et communautaire. Fruit d’une réflexion commune des partenaires des réseaux de l’habitation et de la santé et des services sociaux, le document a reçu l’appui des ministres responsables de ce dossier au moment de sa publication, soit madame Andrée Laforest, ministre des Affaires municipales et de l’Habitation, et son collègue Lionel Carmant, ministre délégué à la Santé et aux Services sociaux.
Les interventions en soutien communautaire ont une longue histoire dans le secteur du logement social. Elles ont débuté dans les années 1980 à la Fédération des OSBL d’habitation de Montréal, avant de s’étendre dans les autres régions. Visant principalement à favoriser la stabilité résidentielle des locataires de logements sociaux, le soutien communautaire est devenu une caractéristique distinctive importante, voire une « marque de commerce » des OSBL d’habitation.
Ces pratiques ayant démontré leurs effets positifs, un premier cadre de référence a été élaboré et lancé en 2007, assorti d’une enveloppe budgétaire annuelle de 5 millions de dollars, qui est demeurée au même niveau pendant une douzaine d’années. En 2020, cette enveloppe, distribuée par le ministère de la Santé et des Services sociaux, a été rehaussée à 8,3 millions $. Les orientations contenues dans le cadre de référence ont toutefois été mises en œuvre de façon inconstante dans les différentes régions, et le comité national censé suivre leur application n’a jamais vraiment été opérationnel.
En 2018, ce comité a finalement été réactivé. Des bilans d’application des pratiques ont alors été réalisés dans les deux grands réseaux, qui ont mené aux travaux de mise à jour du cadre de référence.
La nouvelle version reprend, à peu de choses près, la définition qu’on y retrouvait : « Le soutien communautaire recouvre un ensemble d’actions qui peuvent aller de l’accueil à la référence, en passant par l’accompagnement auprès de services publics, la gestion des conflits entre locataires, l’intervention en situation de crise, la gestion du bail, du soutien ponctuel, le soutien au comité de locataires et aux autres comités et l’organisation d’activités communautaires. En fait, la notion de soutien communautaire désigne “[…] ce qui relève de l’accompagnement social des individus et/ou des groupes”. » Le seul changement, en fait, c’est qu’on a remplacé la locution « intervention psychosociale » par « soutien ponctuel » afin de dissiper toute confusion avec les services offerts par le réseau de la santé et des services sociaux.
Parmi les principaux changements qui ont été apportés, le document est beaucoup plus précis quant à la façon dont les interventions en soutien communautaire doivent être déployées dans les diverses régions. L’accent est mis sur la concertation entre les partenaires concernés, cela, à tous les paliers. Ainsi, « il est désormais obligatoire de mettre en place ou d’utiliser une instance existante de concertation régionale ou territoriale dédiée ou contributive au SCLSC ». Les partenaires régionaux ou territoriaux des réseaux de la santé et des services sociaux et de l’habitation (incluant les fédérations régionales d’OSBL d’habitation) devront en faire partie. Ils pourront également s’adjoindre, s’ils le souhaitent, des partenaires d’autres secteurs.
Ces nouvelles instances (elles existaient dans certaines régions, mais pas partout) détermineront les enjeux et priorités régionales en fonction des besoins identifiés et définiront les modalités d’application du soutien communautaire sur le territoire, à la lumière des principes énoncés dans le cadre de référence.
Ce dernier étant enfin publié, il reste maintenant à s’assurer de sa mise en œuvre, en toute cohérence et dans toutes les régions, mais également au palier national. L’enjeu du sous-financement des interventions en soutien communautaire est systématiquement ressorti dans les bilans qui ont été réalisés dans les deux réseaux, en 2018.
Au cours de la dernière année, le gouvernement du Québec a annoncé de nouvelles initiatives, assorties de nouveaux financements, pour des « services d’accompagnement » qui visent certains projets en particulier (organismes de lutte à l’itinérance ou projets ayant été financés dans le cadre de la phase 1 de l’Initiative pour la création rapide de logements), et qui s’apparentent au soutien communautaire. Ces nouvelles initiatives ont été déployées en faisant abstraction des mécanismes de concertation et des orientations prévues dans le cadre de référence!
La mise en œuvre du cadre de référence et le rehaussement du financement attribué au soutien communautaire sont deux priorités auxquelles le comité national de suivi doit s’attaquer et à propos desquelles le nouveau gouvernement doit être rapidement interpellé. Parallèlement, le comité devra aussi poursuivre la réflexion sur une possible intégration du logement transitoire dans le cadre de référence et en arriver à une conclusion : des discussions à ce sujet sont prévues dès cet automne.
Jacques Beaudoin
Directeur des affaires publiques et juridiques – RQOH