3 mai 2018
« En tentant de corriger à la fois les problèmes d’abordabilité, de vétusté, d’efficacité énergétique et d’accessibilité universelle sans ajuster en conséquence une enveloppe budgétaire qui avait été annoncée uniquement pour résoudre les enjeux d’abordabilité, le gouvernement se tire dans le pied, mais surtout il casse les jambes aux locataires des OSBL d’habitation qui comptaient sur ces ressources pour protéger l’abordabilité de leur logement », déclare le directeur général du RQOH, Stéphan Corriveau
L’essentiel des sommes annoncées devait permettre de prolonger la durée de vie des 550 000 logements sociaux et communautaires au Canada, dont 25 000 logements OSBL au Québec, dont les conventions d’exploitation, signées entre 1965 et 1995 avec la SCHL, arrivent à échéance. Une demande portée par le RQOH depuis des années.
« Ces logements vieillissent, et ont besoin d’être rénovés, mais pour obtenir les financements annoncés (essentiellement des prêts), nous devrons généralement faire des travaux qui endetteront tellement les projets que nous devrons hausser les loyers à des niveaux qui nous empêcheront de poursuivre notre mission d’offrir des logements à un prix que les familles et les personnes à revenu modeste peuvent payer », explique le porte-parole.
« Nous sommes tout à fait d’accord avec l’objectif d’améliorer le bilan environnemental et l’accessibilité du parc existant, explique M. Corriveau, mais nous constatons que le gouvernement ne met pas en place les moyens nécessaires pour atteindre les objectifs annoncés et que cette inadéquation remet en cause l’abordabilité de nos logements, ce qui devrait être la grande priorité. »
Les caractéristiques du logement communautaire québécois ignoré
Le RQOH aurait aussi souhaité que l’accessibilité au fonds tienne davantage compte des spécificités du secteur, et notamment de la situation particulière du Québec dont très peu d’immeubles OSBL sont encore chauffés au mazout ou au gaz et donc émettent relativement peu de gaz à effet de serre. De plus, les OSBL québécois ont déjà mené de vastes campagnes d’efficacité énergétique ces dernières années, y compris grâce à des partenariats avec différents ministères québécois, Hydro-Québec et Énergir. Des centaines d’OSBL québécois se verront donc exclus de facto de la manne fédérale en raison même des efforts consentis ici depuis vingt ans.
Visa le noir, tua le blanc
Bon nombre de ces projets, qui pourraient avoir besoin par ailleurs d’une mise à niveau pour des composantes essentielles à la santé et la sécurité des locataires et la pérennité des bâtiments (remplacer un ascenseur trop vieux, installer un nouveau système de protection incendie, réparer des fondations qui se fissurent, remplacer un drain français qui est bouché, etc.), mais qui n’ont néanmoins pas d’impact énergétique majeur, se verront exclus du programme. Pourtant, la Stratégie canadienne dévoilée en novembre 2017 par le gouvernement fédéral affirmait vouloir « veiller à ne pas perdre les logements locatifs existants en raison de leur délabrement ».
Si le gouvernement veut agir sur les changements climatiques, il peut compter sur les OSBL comme des alliés, mais il ne peut pas sérieusement croire que la somme qu’il consacre à la Stratégie pourra à la fois répondre aux besoins en matière d’abordabilité et aux objectifs de l’Accord de Paris sur le climat.
Le RQOH conteste également le fait que seulement 30 % des logements des projets admissibles devront répondre à des critères d’abordabilité, et cela pour une période de seulement 20 ans. « 100% de nos logements sont abordables aujourd’hui, et ce depuis 25, 35 voire 50 ans. Pour avoir le droit de les rénover, le gouvernement nous impose de choisir entre réduire les gaz à effet de serre et réduire notre offre de logement à bas prix. Le tout dans un contexte ou des centaines de milliers de Québécois et de Québécoises consacrent une part disproportionnée de leur revenu au logement. C’est à n’y rien comprendre ! » s’insurge le porte-parole.
Dans le cadre de la Stratégie canadienne sur le logement, le RQOH continue par ailleurs à fonder beaucoup d’espoir dans la démarche en cours qui doit déboucher sur la présentation d’un projet de loi inscrivant la notion de droit au logement dans l’attirail législatif canadien.
Les groupes locaux sont invités à contacter le conseiller ou la conseillère en logement abordable de la SCHL de leur territoire pour connaître les meilleures options s’offrant à eux en fonction de leur situation particulière. Malheureusement, encore peu d’information est disponible en ligne sur le programme.