9 avril 2019
« Le projet de loi sur la stratégie nationale sur le logement inclus dans la loi budgétaire présentée hier à la Chambre des communes est certainement une bonne nouvelle pour les personnes mal-logées et celles qui ont à cœur le droit au logement. » Telle est la réaction, à chaud, du directeur général du Réseau québécois des OSBL d’habitation, Stéphan Corriveau, au lendemain du dépôt de cette pièce législative fort attendue depuis le dévoilement de cette stratégie il y a 18 mois par le premier ministre Trudeau.
Bien qu’elle ne reconnaisse pas formellement le droit au logement, la nouvelle loi oblige en effet le ministre responsable de l’habitation à élaborer et maintenir une stratégie qui appuiera « la réalisation progressive du droit à un logement suffisant », conformément au Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels dont le Canada est signataire. Pour ce faire, cette stratégie doit « mettre l’accent sur l’amélioration de la situation […] pour les personnes dont les besoins sont les plus criants ».
Cela dit, les mesures concrètes incluses dans le projet de loi pour assurer l’atteinte de ces objectifs sont peu détaillées et s’avèrent minimales. Les pouvoirs du Conseil national du logement, dont les membres seront nommés par le ministre, sont pour le moins ténus puisque c’est ce dernier qui sera appelé à préciser quelles seront ses activités. Quant au défenseur fédéral du logement, dont le poste est créé par cette loi et qui sera administrativement rattaché à la Commission canadienne des droits de la personne, les fonctions qui lui sont attribuées sont certainement plus vastes, mais son pouvoir de recommandation sera limité à la présentation d’un rapport annuel devant le Parlement, auquel le ministre sera tenu de répondre.
« L’absence de toute référence à une stratégie sur le logement distincte pour les autochtones et qui serait mise en place par eux représente une vraie déception, d’ajouter Stéphan Corriveau, alors qu’elle viendrait répondre à des besoins urgents et sans cesse réitérés depuis le lancement de la stratégie canadienne. »
Dans l’avis qu’il a transmis au gouvernement à l’occasion des consultations sur l’approche du logement axée sur les droits de la personne, le RQOH avait insisté pour que la loi reconnaisse formellement et explicitement le droit au logement et qu’elle en inclut une définition. L’organisme avait aussi plaidé pour que la loi contraigne le gouvernement à l’atteinte de résultats « précis, énoncés et mesurables » sur toute une série d’enjeux comme la réduction du nombre de personnes en situation d’itinérance, de ménages éprouvant des besoins impérieux en matière de logement, du nombre de logements insalubres, et d’autres indicateurs similaires.
Le RQOH souhaitait également que la loi inclut une définition de la notion « d’abordabilité » basée sur la capacité de payer des ménages, plutôt que par simple comparaison avec les loyers du marché privé. Le regroupement avait aussi suggéré des mesures pour favoriser la capacité d’agir et assurer l’indépendance institutionnelle du Conseil national du logement et du défenseur fédéral du logement, mesures qui n’ont pas été retenues.
« En dépit de ces faiblesses, qui peuvent en principe encore être corrigées, le projet de loi fédéral représente tout de même un pas en avant, que nous n’hésitons pas à saluer comme tel », de conclure le porte-parole, qui ajoute que le mouvement ne ménagera pas ses efforts pour que le droit à un logement sécuritaire, adéquat et abordable devienne une réalité pour tous et toutes.