1 août 2018
Un projet de tour à logements mixte dans le quartier West End de Vancouver soulève bien des questions. Le promoteur prévoit en effet des aires de jeu pour enfants différentes et une entrée séparée pour les occupants des logements sociaux et les occupants des logements locatifs au prix courant – c’est-à-dire plutôt dispendieux. Le projet recevra des incitatifs fiscaux de la part de la Ville de Vancouver.
Questionné à ce sujet à l’émission « Phare Ouest » de Radio-Canada Colombie-Britannique, Stéphan Corriveau, porte-parole de l’ACHRU et directeur général du RQOH, a d’abord spécifié qu’il est tout à fait bienvenu que des promoteurs encouragent la mixité sociale dans le logement en permettant la cohabitation de personnes de différentes strates de revenu. « Cependant, ici, le promoteur semble faire le fin finaud, a-t-il ajouté. D’un côté, il veut recevoir des fonds publics sous prétexte d’encourager la mixité sociale, mais de l’autre en pratique il pose des obstacles à cette mixité. » L’immeuble doit compter 39 logements sociaux dans les étages du bas et 82 logements locatifs dans les étages supérieurs.
Selon la documentation rendue publique par le promoteur et par les autorités municipales, il semble que le projet réponde à la lettre des mesures pour l’obtention d’exemptions fiscales et de prêts. « Nous sommes bien favorables à ce que la réglementation ne soit pas tatillonne au point d’étouffer l’initiative et la créativité, cependant si les autorités mettent en place des mesures dans l’esprit de favoriser la mixité sociale, elles doivent s’assurer qu’il s’agit bien là de la finalité des projets soutenus. »
« Oui, le logement en milieu urbain dense, dans des tours élevées, pose des problèmes architecturaux et de lien social. Il n’est pas interdit de trouver des solutions audacieuses pour aménager des espaces commerciaux, des logements communautaires et des appartements pour des gens plus aisés, mais ségréger les buanderies, les ascenseurs, les aires de jeu pour les enfants, c’est du jamais vu. Je ne sais pas quel signal le promoteur veut envoyer aux enfants pauvres… et aux enfants riches ! »
Si Vancouver se retrouve dans une situation de pénurie de logements sociaux et de prix extravagants, c’est en raison de 25 ans d’abandon de la part des trois paliers de gouvernement. Le Canada est passé de 30 000 nouveaux logements sociaux par année dans les années 1980 à 5000 logements aujourd’hui. Le déficit de logements ainsi creusé ne résorbera pas en quelques années.
« On ne peut pas se contenter de mesures passives comme d’attendre les initiatives des promoteurs et leur octroyer des exemptions fiscales. Il faut des mesures actives et lancer des chantiers de construction de logement sociaux. Au cours de la dernière année, tant les autorités municipales de Vancouver que les gouvernements de la Colombie-Britannique et du Canada ont pris des décisions courageuses pour favoriser la construction de logements sociaux. Mais on doit compter parfois trois ou quatre années entre le moment où un projet est lancé et le moment où l’immeuble est prêt à être habité. »