Communiqué de presse pour diffusion immédiate
MONTRÉAL, QC, le 8 avril 2022.
Bien qu’il reconnaisse l’ampleur des mesures qu’il contient en matière d’habitation, le Réseau québécois des OSBL d’habitation ne peut qu’exprimer sa profonde déception devant la faiblesse des investissements annoncés dans le budget déposé hier par la ministre Freeland pour mettre en œuvre une stratégie de logement autochtone en milieu urbain, rural et nordique.
La directrice générale du RQOH, Chantal Desfossés, explique : « Promise et attendue depuis le lancement de la Stratégie nationale sur le logement en 2017, le budget annonce enfin que le gouvernement ira de l’avant avec une stratégie autochtone. Toutefois, la somme famélique qu’il y consacre, soit 300 millions de dollars sur cinq ans, est pratiquement une insulte eu égard aux besoins criants des Autochtones qui vivent hors réserve. »
Le Caucus autochtone de l’Association canadienne d’habitation et de rénovation urbaine, dont le RQOH fait partie, évalue à 73 000 le nombre de logements à construire sur un horizon de 10 ans afin de répondre aux besoins d’une population qui fait face à une discrimination systémique sur le marché de l’habitation. Dans ses représentations pré-budgétaires, le caucus estimait à 2,5 milliards $ annuellement la somme nécessaire pour atteindre cet objectif. Pour la porte-parole du RQOH, « les miettes annoncées par le gouvernement Trudeau démontrent qu’il n’a toujours pas compris le véritable sens de la réconciliation avec les peuples autochtones, qu’il ne cesse pourtant de prêcher. »
Plus généralement, le budget annonce plusieurs mesures qui touchent autant au logement locatif, à l’accès à la propriété et à certaines tendances lourdes qui affectent le marché de l’habitation.
Sans surprise, puisque cela avait été annoncée dans la récente entente entre le gouvernement libéral et le Nouveau Parti démocratique, le budget reconduit l’Initiative pour la création rapide de logements (ICRL), dotée d’une allocation supplémentaire de 1,5 milliards $ sur deux ans avec pour objectif de créer 6 000 nouveaux logements.
Pour Chantal Desfossés, « c’est certainement la meilleure nouvelle de ce budget en matière d’habitation ». « Lancé il y a deux ans, l’ICRL est le seul programme de la stratégie fédérale entièrement réservé au secteur sans but lucratif et qui permet de construire des logements réellement abordables pour les personnes à faible revenu. Reste à voir, maintenant, si le gouvernement du Québec exigera une fois de plus le transfert d’une partie de ces fonds et s’il les utilisera à bon escient pour construire de nouveaux logements sociaux et communautaires, en plus de ses propres engagements. »
Autre mesure intéressante, le budget prévoit la réaffectation d’une somme de 500 millions de dollars provenant du Fonds national de co-investissement en logement, qui servira à mettre en place un tout nouveau programme de développement de coopératives d’habitation, ce qui pourrait se traduire par la construction de 6 000 nouveaux logements hors marché. Depuis le retrait du gouvernement fédéral du financement du logement social au début des années 1990, très peu de coopératives d’habitation ont vu le jour dans les autres provinces, pendant qu’au Québec, le programme AccèsLogis soutenait le développement de nouvelles coops.
D’autres mesures parmi celles annoncées sont également bienvenues, comme le maintien pour deux années de plus du financement doublé du programme Vers un chez-soi – la stratégie de lutte à l’itinérance du gouvernement fédéral. Comme annoncé dans l’entente avec le NPD, l’initiative controversée appelée Financement de la construction de logements locatifs, qui offrait une aide aux promoteurs qui s’engageaient à louer une toute petite partie de leurs logements à un loyer dit « abordable » (sic) de 2 275 $ par mois dans la région de Montréal, sera modifiée pour qu’au moins 40 % des logements construits soient offerts à un prix inférieur à 80 % du loyer moyen du marché. On ne parle pas, ici, de logements réellement accessibles pour les personnes vulnérables, mais il s’agit néanmoins d’une nette amélioration.
Découlant également de ladite entente, un paiement unique de 500 $ sera offert aux ménages qui éprouvent des difficultés d’accès à un logement abordable, dans le cadre de l’Allocation canadienne pour le logement. Au Québec, les sommes allouées à cette initiative ont été transférées dans le programme Allocation-logement de la Société d’habitation du Québec. « Sachant que les négociations entre Québec et Ottawa traînent souvent en longueur, on ne peut qu’espérer que les ménages québécois admissibles verront la couleur de cette somme avant la fin de l’année ! », commente la porte-parole du RQOH.
Le regroupement voit également d’un bon œil que le gouvernement s’attaque à l’investissement étranger et à la spéculation, auxquels il compte mettre un frein. Des mesures sont en effet prévues, telles l’interdiction aux entreprises commerciales étrangères d’acheter des propriétés résidentielles pour une période de deux ans et une taxation accrue des bénéfices tirés de la revente d’un immeuble à la suite d’un « flip », dont on peut espérer qu’elles donneront des résultats.
Globalement, le gouvernement fédéral semble néanmoins prisonnier d’une approche qui voit d’abord la hausse prohibitive des prix du logement comme un problème de déséquilibre entre l’offre et la demande. Or, la simple augmentation de l’offre est loin de faire consensus, parmi les experts, si on veut réellement mettre fin à la crise du logement.
Le budget confirme à cet égard la mise en place d’un nouveau fonds de 4 milliards $ sur cinq ans, destiné aux municipalités, pour « accélérer la construction de 100 000 logements ». Il n’y a toutefois aucun objectif précis quant à savoir combien d’entre eux seront réellement abordables pour les ménages qui ne trouvent pas actuellement à se loger convenablement.
Tout en saluant les efforts consentis dans ce budget, le RQOH invite le gouvernement fédéral et la SCHL à prioriser les investissements dans le logement social et communautaire, incluant les logements sans but lucratif exploités par des OSBL d’habitation.
« Augmenter considérablement la part du logement hors marché dans le parc de logements locatifs au Canada serait certainement la meilleure chose à faire pour rééquilibrer le marché et répondre aux besoins des mal-logés », de conclure Chantal Desfossés.
Pour information : Claude Rioux, responsable des communications
Réseau québécois des OSBL d’habitation
c.rioux@rqoh.com / 514 523-6928