Esquisse d'un site sur lequel on bâti des bâtisses en 3D. Source : 3DNative

Une habitation jumelée dont l’enveloppe sera imprimée en usine accueillera deux familles à faible revenu d’ici la fin de 2025, à Amos, en Abitibi-Témiscamingue. Il s’agira du prototype fonctionnel développé par le Regroupement innovant pour l’impression d’immeubles durables (RI³D-FRQNT) en partenariat avec Habitat pour l’humanité.

L’idée est née de la tête d’un enseignant au Cégep de l’Abitibi-Témiscamingue. Des infiltrations d’eau produites par une lacune de construction ont stimulé la réflexion de cet ingénieur de formation. David Laliberté s’est interrogé sur les risques d’erreurs lors de la construction. C’est ainsi qu’il a commencé à s’intéresser à l’impression en trois dimensions.

Sébastien D’Astous, maire d’Amos

C’est du logement social. C’est du logement innovant. C’est une belle tribune pour la Ville d’Amos.

En gros, l’impression en 3D […] est réalisée grâce à une pompe à béton dont la buse se déplace avec précision à l’horizontale et à la verticale. Elle construit la structure de l’immeuble, sans besoin de coffrage, en déposant l’une sur l’autre des couches de matériaux, souvent du béton. La Presse

Première canadienne

La première maison canadienne imprimée en 3D se trouve à Procter, près de Nelson, en Colombie-Britannique. Nommée « maison Fibonacci », elle possède une structure courbée s’inspirant de la séquence mathématique du même nom, aussi observée dans la nature.

Si plusieurs autres pays font l’expérience depuis quelques années, « ce projet nous permettra de suivre la cadence [mondiale], mais aussi de mettre à contribution le savoir-faire québécois pour répondre à un besoin en matière de logements durables et résilients à un coût abordable », selon Ammar Yahia, de l’Université de Sherbrooke, qui s’est associé au projet de David Laliberté.

Première maison Fibonacci, photo : Radio-Canada / Raluca Tomulescu

Première maison canadienne imprimée Fibonnaci
Photo de la première maison imprimée Fibonnaci

Avantages et inconvénients

Bien que la charpente soit bâtie au terme de l’impression, Écohabitation nous rappelle qu’il faut compter le temps d’assemblage, les « fondations, toits, fenêtres, portes, finitions intérieures et extérieures, plomberie, etc. […] qui constituent près de 80 % de la construction d’une maison ».

Quant aux coûts, l’organisme estime qu’une économie pourrait certes être réalisée sur la main-d’œuvre, mais peu de données probantes à ce sujet sont disponibles pour l’instant.

Certains soutiennent que cette technique ne crée pas d’emplois locaux et ne transmet pas de compétences. Or, elle compense le manque de main-d’œuvre chronique que traverse le milieu de la construction. Cela dit, dans les régions où le taux de chômage est élevé, cela pourrait créer d’autres enjeux sociaux.

La maison Tecla

Empreinte environnementale

À l’heure actuelle, les imprimantes 3D sont alimentées avec du mortier-béton ou encore du plastique, qui ne sont pas les matériaux plus environnementaux. En ce qui a trait à l’empreinte carbone, le directeur d’Écohabitation, Emmanuel Cosgrove, est catégorique : « le bois reste encore la matière la moins chère, et la meilleure manière de construire. […] rien ne vaut pour le moment une équipe d’ouvriers sur place qui travaille le bois, qui plus est s’il est local ».

Dans de rares cas, les constructeurs ont utilisé de la boue locale ou une pâte de composite de bambou. C’est le cas de la maison circulaire Tecla, construite en argile en seulement 200 heures. Le procédé, qui exploite les matériaux trouvés sur le site, réduit presque à néant les émissions.

Si les matériaux biosourcés ont rarement été utilisés, l’impression réduit considérablement les déchets de construction de la charpente. En effet, l’imprimante connaît la quantité exacte de matériau à utiliser. Le béton sera toutefois plus difficile à recycler. Aussi, bien que résistante aux conditions climatiques, rien n’indique pour l’instant que la maison imprimée supplante la maison traditionnelle à ce chapitre.

Une technologie à parfaire

La Société canadienne d’hypothèques et de logement (SCHL) a récemment livré les premiers logements collectifs imprimés en 3D au Canada, à Leamington, en Ontario.

Pour l’instant, l’impression 3D est davantage adaptée à la construction de maisons, et moins à celle du multilogement. Elle conserve tout de même un intérêt pour les plus petites surfaces. Cette technique permet également une grande liberté de forme, qui peut être adaptée à l’environnement local.

En définitive, l’impression 3D demeure expérimentale et il faudra patienter quelques années avant de bien cerner les avantages et les inconvénients qu’elle laissera dans le sillage de son bras robotisé.

Photo de la façade d'un des premiers logements collectifs imprimés au Canada et de ses occupants