Dans le cadre d’une conférence de presse tenue le 11 mai dernier, la mairesse de Val-d’Or, Céline Brindamour, a lancé un appel à l’aide au gouvernement provincial face à la situation de l’itinérance et de la délinquance dans sa municipalité.

Si l’itinérance était un problème connu, la délinquance vient s’ajouter aux enjeux vécus par les citoyens, qui se tournent vers leur gouvernement de proximité.

La mairesse a rappelé, dans une lettre ouverte publiée par La Presse, que la Ville « excède déjà ses champs de compétence en participant à divers comités stratégiques et en soutenant les actions concrètes de [ses] partenaires, en plus d’avoir mis en place une panoplie d’actions afin d’atténuer les tensions dans le milieu […] ».

Elle demande aux résidents de ne pas faire d’amalgame entre itinérance et délinquance. Le conseiller municipal Benjamin Turcotte met également ses concitoyens en garde contre les discours haineux qui circulent sur les réseaux sociaux, qui ne sont pas représentatifs de l’opinion de la population.

Mme Brindamour appelle le gouvernement au Québec à réagir en déployant davantage de policiers sur le territoire. Elle souhaite également un nombre accru d’intervenants sociaux, puisque les ressources communautaires sont à bout de souffle.

Aussi, la mairesse demande l’ouverture d’un centre de jour pour les personnes en situation d’itinérance. L’objectif est de réinstaurer le sentiment de sécurité et d’assurer des mécanismes de sortie de rue pour éviter les tragédies. Elle a d’ailleurs invité le ministre responsable des Services sociaux, Lionel Carmant, et le ministre de la Sécurité publique, François Bonnardel, à se rendre sur le terrain pour constater l’ampleur de la situation.

Des propos controversés du député d’Abitibi-Est

Le 15 mai, lors d’une séance du conseil municipal de Val-d’Or, le député d’Abitibi-Est, Pierre Dufour, a ouvertement critiqué la mairesse Céline Brindamour. Il a mentionné que le gouvernement pouvait offrir un coup de main financier et possiblement créer des programmes. Il a aussi soutenu que la Ville avait demandé une mise sous tutelle, ce qui a soulevé l’indignation de la mairesse, qui s’est défendue d’avoir tenu de tels propos. M. Dufour a ajouté qu’« il faut que des mesures sérieuses soient prises, comme de la répression », ajoutant qu’« il faut trouver le moyen d’enfermer le fameux noyau de 25-30 individus qui font la crainte de tout le monde ici présentement ».

Il a accusé la municipalité d’avoir œuvré « avec un tas de merde qui a été créé particulièrement depuis 2015 lorsqu’il y a eu l’émission Enquête, une émission bourrée de menteries, qui a attaqué des policiers très honnêtes ». Selon lui, la municipalité n’a pas défendu le corps policier et cela aurait créé un point de rupture entre les deux instances. Il a du même souffle critiqué la Commission Viens, qui dénonçait que les policiers de Val-d’Or donnent davantage de contraventions aux Autochtones, ce qui aurait pour effet de les raciser.

Une déclaration conjointe en faveur de la paix sociale

Dans une déclaration rendue publique le 23 mai, le Centre d’amitié autochtone de Val-d’Or, membre du RQOH, a qualifié d’inacceptables et indignes les propos de Pierre Dufour.

Cosignée par Femmes autochtones du Québec, le Regroupement des centres d’amitié autochtones du Québec, Amnistie internationale Canada, la professeure Carole Lévesque de l’INRS, Peggie Jérôme, de l’organisme Mino Obigiwasin, de même que les professeurs Suzy Basile et Sébastien Brodeur-Girard, de l’École d’études autochtones de l’UQAT, la déclaration indique que M. Dufour a manqué à son devoir, nuisant du coup à la paix sociale, à la réconciliation entre les peuples et à la collaboration entre les organismes et les institutions. Ils estiment également que les propos du député « discréditent les témoignages de victimes courageuses et viennent rouvrir les plaies à peine cicatrisées, tant chez les femmes autochtones que parmi la population en général ».

Le Centre d’amitié autochtone de Val-d’Or ajoute que l’intervention publique du député d’Abitibi-Est constitue une « atteinte à la démarche démocratique de la commission Viens, un exercice qui ouvre pourtant la porte à un nouveau dialogue et à des engagements responsables et positifs ». Les partenaires craignent ainsi une radicalisation du discours, qui pourrait engendrer du racisme et de la discrimination systémique.

Malgré les excuses formulées par le député, l’Assemblée des Premières Nations du Québec et du Labrador et Québec solidaire réclament sa démission.

 

Sources :

https://ici.radio-canada.ca/nouvelle/1978876/societe-abitibi-delinquants-itinerance-securite

https://ici.radio-canada.ca/nouvelle/1980003/itinerance-delinquance-centre-ville-abitibi

https://www.lapresse.ca/debats/opinions/2023-05-17/l-itinerance-au-coeur-de-nos-municipalites.php

https://ici.radio-canada.ca/nouvelle/1981496/autochtones-conseil-val-dor-securite

https://www.enbeauce.com/actualites-nationale/somme-de-demissionner-pierre-dufour-s-explique/14128

https://www.lecitoyenvaldoramos.com/article/2023/05/24/propos-sur-l-itinerance%E2%80%AF-pierre-dufour-pris-a-partie