21 novembre 2022
Depuis une quarantaine d’années, les groupes de ressources techniques se consacrent à la construction du logement social et communautaire au Québec. Nous pouvons être fiers du modèle québécois, qui est garant de justice sociale, puisqu’il vise l’amélioration des conditions d’habitation des ménages à faible et modeste revenu en luttant contre la pauvreté et l’exclusion sociale.
Comme l’indique l’Association des groupes de ressources technique (AGRTQ), le réseau des GRT est à l’origine d’un parc immobilier de plus de 80 000 logements sociaux et de nombreux projets immobiliers collectifs sur le territoire. Il suffit de visionner le documentaire Les Bâtisseurs : 40 ans d’habitation communautaire au Québec[1], afin de réaliser l’importance de ceux-ci dans le développement de notre parc immobilier.
Les GRT sont des guides dans toutes les phases du développement de projets ou de la rénovation de bâtiments et assurent le lien entre les différentes parties prenantes, qu’il s’agisse des locataires, des administrations publiques, des entrepreneurs ou des autres professionnels. Ils accompagnent les organismes dans le développement des projets dans des milieux parfois difficiles où les individus ont des besoins particuliers. Leur objectif est d’assurer la faisabilité des projets d’habitation et de répondre aux critères des bailleurs de fonds.
Aussi, un bon GRT doit se doter d’une vision à long terme, tant en ce qui a trait à la gestion sociale qu’immobilière. Il doit veiller à ce que l’organisme développeur soit en mesure de gérer toutes les facettes qui permettront la viabilité du projet d’habitation.
Les GRT doivent parfois se transformer en magiciens, notamment lorsqu’ils se buttent au manque de financement et à la lourdeur administrative des différentes étapes d’approbation. Aussi, en raison des nouveaux paramètres imposés par le gouvernement provincial avec le Programme d’habitation abordable Québec (PHAQ), les GRT n’ont pas la certitude d’avoir les outils financiers pour réaliser les projets accompagnés. Il leur faut parfois identifier d’autres leviers, et cela n’est pas toujours chose simple.
Certains GRT ont développé une expertise pour les projets d’habitation destinés aux personnes nécessitant un logement adapté à leurs besoins. Cela nous permet de bien voir les particularités des logements qui leur sont destinés. Certains offrent des espaces communs (ex. cafétéria) pour faciliter le cheminement des locataires et hébergés vers la reprise de leur autonomie domiciliaire.
La grande différence dans la vie de ces individus est l’apport du soutien communautaire. Même en offrant un toit sécuritaire, sans les services de proximité, les gens ne peuvent pas toujours maintenir leur logement et sont susceptibles de retourner dans le cycle de l’itinérance.
Il est également primordial de bien cibler la population desservie par l’organisme afin que le projet soit fidèle à ce qu’il considère essentiel, qu’il s’agisse d’hébergement temporaire, permanent ou transitoire. Cela permet aux GRT de savoir comment le réaliser fidèlement et de le viabiliser. On vise des milieux fonctionnels et pérennes. D’où l’importance de connaître les espaces communs nécessaires et de faire valoir aux bailleurs de fonds les besoins particuliers des locataires et hébergés. Les bailleurs de fonds ne connaissent pas chacune des populations et il faut parfois dresser un argumentaire permettant l’acceptabilité sociale des projets déployés. On désire créer un sentiment d’appartenance et de sécurité, favoriser le maintien en logement et assurer la cohésion sociale.
Le danger, avec certains milieux de vie, est de tomber dans le carcan institutionnel. Il faut se distinguer du milieu hospitalier et redonner le plein pouvoir aux individus.
L’une des solutions est de préconiser le continuum de services plutôt que de demeurer dans l’urgence sociale. En effet, une personne qui a passé un long séjour dans la rue n’est pas nécessairement en mesure de prendre soin d’un logis du jour au lendemain. Ces individus ont besoin d’accompagnement. Leur cheminement doit se faire par étape.
Nous sommes d’avis qu’il serait souhaitable de mieux faire rayonner ces projets qui témoignent de la réussite du modèle social et communautaire, qui permet aux gens de retrouver l’équilibre et d’accéder à la stabilité résidentielle.
Pour ce faire, la Société d’habitation du Québec (SHQ) devrait mettre l’accent sur les avantages de ce type d’habitation. Il y a un important travail de sensibilisation à effectuer.
Le gouvernement actuel mise sur le nombre d’unités construites, sans définir le type de logement nécessaire. Pour sortir de l’impasse, il est primordial d’accroître le nombre de logis et de comprendre que les personnes ne cadrent pas tous avec la notion d’abordabilité, telle que définie par les décideurs publics.
Katia Brien-Simard, chargée des communications de la Fédération des OSBL d’habitation de l’Outaouais
Avec la précieuse collaboration d’Iza Godbout, chargée de projets du GRT Innovation Habitation Outaouais
[1] https://www.lesbatisseurs.quebec/