Les signataires dirigent les organismes voués à la promotion du logement communautaire

A l’occasion, les gestes posés par les administrations publiques peuvent donner l’impression que la question du logement est définitivement résolue. Le succès récent de l’intervention du gouvernement du Québec – qui repose en grande partie sur la mobilisation des acteurs communautaires de la société québécoise – ne doit pas faire oublier qu’il s’inscrit dans une tradition bien ancrée qui doit être poursuivie avec rigueur et constance. Le dépôt prochain du budget provincial du gouvernement Charest est l’occasion de poursuivre sur cette lancée.

Les impacts positifs des investissements gouvernementaux, par l’accélération du programme AccèsLogis et la mise en œuvre du programme de logement abordable ne doivent pas faire oublier que des changements structurels importants sont en cours, conséquence du soi-disant rattrapage du marché résidentiel québécois par rapport aux autres marchés nord-américains.

Malgré les efforts des dernières années, l’accès à un logement abordable, décent et de qualité, pour toutes les catégories de populations demeure en effet difficile. Si l’effort actuel n’est pas poursuivi, cette situation pourrait facilement devenir permanente. Des solutions durables s’imposent donc plus que jamais. A cet égard, le Québec bénéficie cependant d’atouts importants dont la rentabilité sociale et économique s’est avérée avec brio dans les quarante dernières années.

Une action sociale et économique

Il y a en 2005 plus de 55 000 logements communautaires au Québec. Grâce à l’implication sociale et financière des communautés locales et d’un financement partiellement assumé par le gouvernement, cet impressionnant parc de logements est le fruit d’un partenariat, non pas privé-public (pour reprendre une expression à la mode par les temps qui courent), mais communautaire-public, amorcé il y a maintenant plus de quarante ans. Ce parc, d’une grandeur équivalente au parc québécois de HLM, dessert toutes les régions du Québec.

Fondé sur le bénévolat, le secteur communautaire repose sur les groupes de voisinage et sur les communautés locales. Sous la forme d’organismes sans but lucratif ou de coopératives, il répond à une variété impressionnante de besoins: personnes âgées, familles, personnes seules, problématiques particulières. A la situation conjoncturelle de crise du début de la décennie, le secteur communautaire a répondu haut et fort à l’appel des administrations publiques. Il demande maintenant au gouvernement de poursuivre de manière durable l’effort collectif.

Poursuivre l’effort

Dans la période récente, c’est principalement au secteur communautaire que le gouvernement québécois a confié l’effort de résoudre la pénurie de logements locatifs : des 13 000 unités construites dans le cadre des programmes, c’est en effet plus de 80%  -2- de la nouvelle offre de logement social que le milieu communautaire a construit, contribuant ainsi plus que tout autre acteur à résorber la pénurie actuelle.

À côté des secteurs privé et public, celui-ci joue plusieurs rôles essentiels dans le marché du logement : non seulement, il permet de suppléer le marché privé dans la revitalisation sociale et économique des territoires, mais il permet aussi d’offrir un parc de logement de qualité à des prix abordables et répond donc à une grande variété de besoins généralement boudés par le secteur privé. Le secteur coopératif et sans but lucratif peut permettre d’influencer de manière significative le marché du logement, à condition d’atteindre, à l’instar de plusieurs autres régions , villes ou pays en Occident, une part significative du marché. Le Québec peut se distinguer grâce au rôle joué par les acteurs communautaires dans la production de notre parc social. Et plus encore, il pourrait figurer parmi les meilleurs en inscrivant de manière durable une proportion importante du logement communautaire dans l’ensemble du marché résidentiel.

Des gestes immédiats pour un effort à long terme

Le budget qui vient peut permettre d’aller au-delà de la réponse partielle et conjoncturelle et inscrire de manière durable le rôle complémentaire et essentiel du secteur communautaire. Des gestes importants peuvent être rapidement posés et faire l’objet de propositions dans le prochain budget provincial, dès cette année. Le gouvernement doit dès maintenant reconduire les programmes actuels de construction de logement social en améliorant les conditions de leur réalisation et en proposant un objectif minimal de production de logements communautaires pour répondre aux besoins. Des efforts nouveaux doivent aussi être consentis pour permettre d’assurer le financement du support communautaire offert dans les résidences pour les personnes âgées en perte d’autonomie, les sans-abris, etc.

Le gouvernement doit aussi rapidement finaliser les discussions avec le gouvernement fédéral pour conclure enfin le transfert des responsabilités et l’obtention des sommes qui lui sont dues. Il doit finalement s’engager à l’égard du maintien, de la consolidation et du développement des organismes oeuvrant dans le secteur du logement communautaire

Les succès indéniables de l’habitation communautaire, comme réponse aux besoins d’habitation, comme acteur de revitalisation du territoire, comme générateur d’une économie solidaire et d’un patrimoine immobilier collectif ne sont plus à démontrer. Le prochain budget provincial constitue l’occasion idéale de confirmer ce secteur comme un véritable partenaire porteur d’un avenir meilleur.

Édith Cyr, présidente, Association des groupes de ressources techniques du Québec,

Marc Lamarche, président, Confédération québécoise des coopératives d’habitation,

Benoît Fortin, président, Réseau québécois des OSBL d’habitation

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