3 février 2022
Communiqué de presse – pour diffusion immédiate – Montréal, le 3 février 2022 – Le Réseau québécois des OSBL d’habitation est insatisfait de l’annonce faite ce matin par la ministre des Affaires municipales et de l’Habitation, Mme Andrée Laforest, qui a rendu public le nouveau programme appelé Programme d’habitation abordable Québec (PHAQ), destiné à succéder à AccèsLogis. « L’intention de la ministre est d’accélérer la construction de logements, en particulier de logements abordables pour les ménages québécois. Cet objectif, nous en sommes. Il y avait un moyen de le faire : financer correctement et moderniser le programme AccèsLogis, qui a bien servi les Québécoises et les Québécois depuis sa mise en œuvre il y a vingt-cinq ans », dit Chantal Desfossés, porte-parole du RQOH.
Or, le gouvernement a choisi une autre voie, soit de remplacer, à terme, ce programme et d’aller vers une toute nouvelle approche en matière d’habitation. Mentionnons que contrairement à ce que la ministre a affirmé, ce changement de cap a été fait sans consultation des partenaires et du milieu. « L’orientation retenue dans le PHAQ remet en question l’approche qui a été celle de tous les gouvernements depuis 25 ans au Québec, selon Chantal Desfossés. Plutôt que de viser l’offre de logements pour les personnes à revenus faibles ou modestes, on parle désormais uniquement de logements “abordables” dont le coût sera fixé en fonction du loyer médian du marché. » Contrairement au programme AccèsLogis, le cadre normatif du programme ne prévoit pas l’allocation de suppléments au loyer pour ajuster le montant de loyer à la capacité de payer des locataires qui pourront habiter dans ces logements.
La notion de mixité sociale est donc complètement mise de côté dans le PHAQ. Dans AccèsLogis, un certain nombre de logements (généralement 50 %) sont réservés à des personnes à faibles ou très faibles revenus pour qui le loyer est calculé en fonction de leur capacité de payer. Les autres logements sont loués à un prix abordable pour des personnes qui ont un revenu modeste. Pour Mme Desfossés, « cela a permis de créer des ensembles de logements solides financièrement, dynamiques, qui stimulent une intégration plus facile des différentes clientèles cibles. Ce concept est écarté du PHAQ. » La ministre dit qu’il sera possible que des suppléments au loyer soient autorisés pour certains projets, mais cela ne fait pas partie du cadre normatif du programme, contrairement à AccèsLogis.
Deuxième différence fondamentale, le programme est ouvert aux développeurs privés à but lucratif. Jusqu’à maintenant, la réponse aux besoins en logement des ménages québécois en difficulté a toujours passé par le logement social et communautaire, c’est-à-dire des ensembles de logements développés par des organismes sans but lucratif (OSBL), des coopératives ou des offices d’habitation. « Les organismes de notre secteur, dit Mme Desfossés, développent des projets qui n’ont aucune finalité de profit et sont uniquement destinés à servir les ménages dans le besoin, leur offrir du logement réellement abordable de manière pérenne pour toute la durée de vie utile des immeubles. Le nouveau programme va permettre à des développeurs privés d’utiliser des fonds publics pour construire des logements que l’on dit abordables, mais qui ne le seront pas pour tout le monde, et seulement pour un temps limité qui pourrait n’être que de quinze ans ! » Par la suite, ces promoteurs pourront faire ce qu’ils veulent, et on voit actuellement ce que le marché nous réserve en matière de logement locatif : hausse de loyers, rénovictions, spéculation. À notre avis, il s’agira d’un gaspillage de fonds publics.
La troisième réserve du RQOH concerne la façon dont le nouveau programme envisage les appels de projets, qui seront l’apanage exclusif de la Société d’habitation du Québec (SHQ). Ces appels mettront en concurrence les développeurs de logements sans but lucratif avec les promoteurs privés à but lucratif pour répondre dans un très court délai de quarante-cinq jours à des appels ciblés de la SHQ. « Nous craignons que cela décourage les initiatives du milieu, portées notamment par les municipalités, les organismes communautaires, les citoyens et citoyennes qui se regroupent pour développer des projets, qui ne seront vraisemblablement pas en mesure de concurrencer le secteur privé, particulièrement les gros joueurs du domaine immobilier qui disposent de moyens considérables pour répondre rapidement à ces appels de projets », analyse Chantal Desfossés.
Enfin, la ministre a évoqué en conférence de presse les 200 M$ déjà annoncés dans le mini-budget du ministre Girard en novembre dernier pour amorcer la réalisation d’approximativement 2200 logements sur une période de cinq ans dans le nouveau programme. Pour Chantal Desfossés, « si c’est ce que la ministre entend par accélérer et augmenter l’offre de logements abordables pour les ménages dans le besoin, alors que le gouvernement lui-même nous rappelle que plus de 200 000 ménages consacrent plus de 60 % de leur revenu pour se loger, on est loin de la “révolution” que nous annonce la ministre ».
Pour terminer, le RQOH réaffirme sa demande d’un investissement massif en logement social et communautaire de propriété collective et sans but lucratif dans le prochain budget pour réaliser au moins 5 000 logements par année au cours des prochaines années. C’est là la seule façon de répondre aux besoins des ménages réellement en difficulté au Québec.
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Pour information : Claude Rioux, responsable des communications
Réseau québécois des OSBL d’habitation
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