L’avis transmis propose de nombreuses recommandations afin que la loi contribue plus favorablement à l’exploitation des OSBL d’habitation (OSBL-H), aux conditions d’habitation des citoyens et à la réalisation du droit au logement.
Le mémoire, qui peut être consulté dans son intégralité, s’inspire de la mission du RQOH de favoriser la reconnaissance, le développement et la pérennité des OSBL-H.
Section F du bail
Compte tenu des augmentations incontrôlées des prix des loyers, le fait d’écarter le Tribunal administratif du logement (TAL) de la fixation de ceux-ci les cinq (5) premières années nuit selon nous à l’équilibre entre locataires et locateurs.
L’obligation, pour les locateurs, d’indiquer le montant maximal qui pourrait être exigé pendant cette période ne changera pas la situation des ménages qui se retrouvent à la merci du marché.
En effet, il nous semble que la prévisibilité ne fait pas le poids face à la hausse fulgurante des prix des loyers et des effets pervers de la financiarisation du logement.
Aussi, les locataires devraient pouvoir exercer, en tout temps, les recours en fixation des conditions de bail prévus au Code civil.
Il serait également possible d’ajouter des critères particuliers relativement aux dépenses d’exploitation ou d’immobilisation, qu’il s’agisse des bâtiments neufs ou convertis.
Reprises et évictions
Nous sommes favorables au resserrement des modalités permettant à un locateur d’évincer un locataire. Cela nous semble bénéfique à ces derniers, notamment en créant des obstacles aux rénovictions abusives.
Les mesures prévues dans le projet de loi sont dissuasives pour les propriétaires qui souhaiteraient réaliser des profits à tout prix, nuisant ainsi à l’équilibre global du marché locatif.
Nous voyons également d’un œil favorable les indemnités, allant jusqu’à 24 mois de loyer, versées aux locataires subissant une éviction de leur logement. Cela pourra les aider à se reloger dans un logis dont le prix s’avérera probablement plus élevé dans le contexte actuel du marché immobilier, comme en témoignait la Société canadienne d’hypothèques et de logement (SCHL) dans son dernier Rapport sur le marché locatif (janvier 2023).
Quant aux évictions de mauvaise foi, il nous semble positif qu’il appartienne au locateur de démontrer le bien-fondé de la démarche, plutôt que de laisser le locataire effectuer les vérifications qui s’imposent afin de faire valoir ses droits.
Le seul bémol que nous aimerions apporter réside dans l’absence de mécanisme de vérification pour contrôler les évictions. Aussi, nous suggérons que les évictions, de même que les reprises de logement, soient colligées dans un registre public administré par le TAL.
Cession de bail
La modification aux règles prévues dans le cadre des cessions de bail est certainement l’élément qui a fait l’objet du plus grand nombre de critiques des associations du milieu de l’habitation et du public. Notre Réseau est étonné que le projet de loi prévoit laisser les propriétaires refuser des cessions de baux pour des motifs autres que sérieux.
Le droit de cession est un des deniers recours des locataires favorisant la protection de l’abordabilité du parc de logements locatifs.
Le manque de logis abordables fait partie des causes structurelles de la crise actuelle. Nous recommandons ainsi l’abolition complète de cette modification et que la question soit réévaluée une fois le plan d’action en habitation mis en œuvre.
L’un des motifs soulevés par certains pour permettre aux propriétaires de refuser une cession de bail sans avoir à invoquer une raison sérieuse, c’est le fait que des locataires céderaient leur bail moyennant de l’argent. Nous suggérons d’interdire spécifiquement cette pratique plutôt que de modifier l’encadrement actuel des cessions de bail.
Tout comme dans le cas des loyers des logements à loyer modique, qui font l’objet d’encadrements à ce chapitre, nous sommes d’avis que les logements à loyer modeste notamment prévus par le Programme d’habitation abordable Québec (PHAQ), dont la règlementation de l’attribution est attendue, devraient eux aussi être soustraits aux règles sur les cessions de baux.
Ainsi, nous suggérons qu’une notion similaire à celle des HLM soit introduite dans le cadre des cessions de baux des loyers dits modestes.
Modifications à la Loi sur les compagnies
Concernant l’aliénation d’immeubles appartenant aux OSBL-H, nous croyons que des précisions au projet de loi s’imposent, afin d’éviter que des individus tirent personnellement profit de biens publics, comme dans le cas de la Cité des retraités de l’Estrie (Faubourg Mena’Sen).
Ainsi, dans le cas où un immeuble est cédé par un OSBL d’habitation à un autre OSBL d’habitation, il faut s’assurer que le même encadrement des aliénations subséquentes se perpétue.
Loi sur la Société d’habitation du Québec
Le projet de loi 31 apporte certaines modifications aux procédures applicables dans les cas où le ou la ministre responsable de l’habitation impose une administration provisoire à un organisme. Le mémoire du RQOH propose quelques amendements pour en préciser certains aspects.
Entre autres, il nous apparaîtrait pertinent de reconnaitre une place aux fédérations régionales et regroupements dans le processus menant à l’imposition d’une tutelle aux organismes en difficulté.
Loi sur le Tribunal administratif du logement (TAL)
Nous sommes favorables à l’élargissement des règles de représentation des parties auprès du TAL. Cet assouplissement devrait, selon nous, s’appliquer aux causes pendantes, et pas seulement aux demandes qui suivront l’adoption du projet de loi.
Autres recommandations
Registre des loyers
Nous sommes favorables à l’établissement d’un registre des loyers à déclaration obligatoire.
D’ailleurs, la section G du bail, qui concerne le plus bas loyer payé dans les 12 mois précédents n’est pas toujours remplie par les locateurs, comme en témoignait un sondage de Léger, qui chiffrait à 35 % la proportion de locateurs qui omettaient ou négligeaient celle-ci.
Sans être l’unique solution à la crise, un registre public obligatoire contribuerait à freiner la flambée des loyers, en plus de jeter un éclairage dans le cadre de l’élaboration des politiques publiques.
L’organisme Vivre en ville a d’ailleurs lancé un registre des loyers clé en main, qui respecte les règles du Code civil en matière de fixation de loyer.
Des consultations seraient de mise dans le déploiement de cette obligation. Le registre pourrait être confié au TAL et l’expertise de Vivre en ville, mise à contribution dans ce contexte.
Taux de taxation foncière différencié
Actuellement, la loi ne permet pas aux municipalités qui le souhaiteraient l’adoption un taux de taxation différent pour les immeubles appartenant à un OSBL ou une coopérative d’habitation. Nous proposons donc une modification à la Loi sur la fiscalité municipale pour leur accorder ce pouvoir.
Les taxes foncières représentent près de 7 % des dépenses d’exploitation des OSBL-H. Une réduction du taux de taxation, dans les municipalités qui s’en prévaudraient, permettrait entre autres aux organismes d’investir les sommes dans la réalisation de travaux de mises à niveau afin d’accroître leur durée de vie.
En conclusion, nous espérons que les recommandations proposées seront accueillies favorablement par la ministre et que cette consultation resserrera le travail, le dialogue et la collaboration entre le RQOH et le gouvernement provincial.