Pistes de solution
Le constat est clair : le financement des organismes communautaire est insuffisant. Lorsqu’offert à court terme (par projet), comme avec le programme Vers un chez soi, le financement mobilise les ressources, de façon à constituer un obstacle à la planification à long terme, même lorsqu’il répond adéquatement aux besoins urgents.
Il est impératif d’offrir un meilleur filet de sécurité sociale face aux enjeux de santé mentale et de toxicomanie. L’insuffisance des ressources et les difficultés d’accès aux services aggravent les problèmes des individus qui les traversent.
Le manque de coordination et de responsabilités des organisations, ministères et juridictions limite aussi l’efficacité des réponses à la crise.
Mme Houle soutient que la police et les services d’urgence ne devraient pas être les principaux points de contact entre les gouvernements et les campements. Selon elle, il faut plutôt miser sur les structures informelles et renforcer celles-ci. Ce processus participatif documenté devrait également être mené par des personnes en qui les résidents ont confiance.
Il appert essentiel de mettre l’accent sur la dignité et le respect des droits des résidents des campements, afin de mieux répondre à leurs besoins fondamentaux.
Une réflexion s’impose afin d’inclure dans le dialogue les personnes concernées ayant une expérience vécue des campements.
Leadership fédéral
Pour affirmer son leadership en matière de logement, le gouvernement fédéral devrait affecter plus de ressources financières et mieux coordonner les interventions des différents paliers gouvernementaux. Il pourrait également tâcher d’éliminer la confusion entre les compétences.
Des accords et des transferts pourraient veiller à ce que tous les paliers aient des normes conformes aux droits de la personne.
Nous devons collectivement reconnaître l’urgence de la situation dans les communautés de toutes tailles et s’impliquer dans la lutte à la discrimination et à la stigmatisation.
Mme Houle suggère au gouvernement de s’inspirer de l’Initiative pour la construction rapide de logements (ICRL) pour accélérer la cadence de livraison des unités et de se doter d’un fonds d’acquisition. Le fédéral pourrait également déployer un nouveau financement prévisible qui tiendrait compte de la réalité des communautés rurales et éloignées.
Appels à l’action
Afin de remédier cette crise humanitaire, la défenseure propose plusieurs mesures concrètes visant à assurer la mise en œuvre des recommandations. Les actions entreprises doivent ainsi être soutenues par des mesures spécifiques et réalistes.
Parmi les recommandations :
- Élaborer un plan national d’intervention;
- Opter pour des solutions axées sur les droits de la personne en respect des minorités;
- Respecter les droits des autochtones tout en continuant de financer leurs initiatives spécifiques;
- Protéger le droit à la vie et à la dignité et réduire les risques;
- Mettre en œuvre des mesures immédiates afin de reloger le plus rapidement les personnes vivant dans les campements;
- Rendre le gouvernement imputable et garantir l’accès à la justice.
Recommandations détaillées
Entre autres détails des recommandations, la défenseure soulève la nécessité d’engager de nouvelles ressources répondant à l’ampleur du phénomène des campements. Elle rappelle l’importance de miser sur l’expérience vécue afin de bien cerner les enjeux vécus sur le terrain.
Elle insiste sur la pertinence de mener des processus consultatifs avec les peuples autochtones et de reconnaître leurs spécificités afin d’assurer un meilleur arrimage et un suivi rigoureux des résultats des stratégies définies par les collectivités.
Afin de concrétiser l’ensemble des recommandations, il importe d’opter pour des solutions axées sur les droits de la personne. Mme Houle indique d’ailleurs qu’il serait de mise de modifier la législation afin de mieux reconnaître le droit de la personne à un logement adéquat.
Elle réclame un meilleur financement des provinces, territoires et municipalités, de même que le déploiement de mécanismes face à la discrimination sociale.
Elle valorise également des mesures immédiates afin de réduire les risques pour la santé et la sécurité des campeurs, notamment l’interdiction des expulsions et de meilleurs soins en matière de santé et de toxicomanie.
En parallèle, dans une optique de réduction des méfaits, et face à la multiplication des décès par surdose, elle indique qu’il est impératif de mener des opérations de sensibilisation face à l’usage des drogues.
Selon le rapport, il importe de conscientiser les campeurs face à leurs droits et de leur permettre de prendre part à la prise de décision collective. Il faut également stabiliser ces individus avec du soutien social et les services essentiels, et ce 24/7, par le biais de refuges à faible seuil. Les municipalités devraient également permettre l’utilisation des espaces publics et interdire l’architecture hostile.
Pour s’attaquer aux causes profondes de l’itinérance et offrir un logement suffisant à tous les citoyens, il est nécessaire de mieux soutenir les initiatives de logements hors marché. Cela permettrait d’offrir aux personnes fragilisées des logements supervisés plus inclusifs et réellement abordables.
Le gouvernement a la responsabilité d’assurer le renforcement de la protection des locataires et le financement des organismes en logement. Il doit également cerner et enrayer les défaillances systémiques et interdire la discrimination sociale.
En outre, il lui faut veiller à un meilleur entretien du parc immobilier et déployer un fonds d’urgence pour les retards des loyers. Cela pourrait freiner le phénomène des évictions, qui a conduit plusieurs personnes vers l’itinérance.
Le gouvernement doit finalement imposer à ses fonctionnaires exerçant des responsabilités relatives au logement et à l’itinérance une formation sur le droit au logement adéquat et développer leur sensibilité culturelle.
Conclusion
En conclusion, le rapport présente plusieurs faits, critiques et recommandations, apportant davantage d’éclairage sur l’état de la situation des campements au Canada.
Le réel tour de force du rapport tient du filigrane sous-tendant l’ensemble du travail de documentation et de ses déclarations : replacer au centre des descriptions et prescriptions la parole des personnes n’ayant pas de logement suffisant.
Afin de sortir de l’urgence sociale, il faut identifier des alternatives pérennes aux démantèlements et assurer aux citoyens un cheminement vers un logement permanent. La défenseure du logement lance ainsi un plaidoyer en faveur des droits de la personne et invite les décideurs locaux à le porter localement.
Lire le communiqué : https://www.housingchrc.ca/fr/le-rapport-de-la-defenseure-federale-du-logement-reclame-une-reponse-nationale-a-la-crise-des-campements
*Rappelons que Mme Houle est la première personne à occuper cette fonction favorable au droit à un logement suffisant au pays. Un poste qui a pour but de favoriser des changements et une reddition de comptes des décideurs gouvernementaux en matière de droit au logement.