16 août 2017

Faciliter la réinsertion des victimes d’exploitation sexuelle par le logement

Une initiative inédite au Québec vise à développer un modèle d’intervention en logement pour les victimes d’exploitation sexuelle, et ainsi, leur offrir une porte de sortie du milieu criminel et du soutien dans leur réinsertion sociale. L’organisme La Sortie, membre de la FOHM, a été sélectionné par le ministère de la Sécurité publique du Canada pour mettre en œuvre le projet de recherche, nommé « Horizon ».

« Nous espérons que ce projet marquera un tournant dans le soutien offert aux victimes d’exploitation sexuelle et de traite au Québec, souligne Ronald Lepage, directeur de La Sortie. Il est temps que nous disposions, comme c’est le cas ailleurs au Canada, d’une offre en logement pour ces personnes qui vivent des situations très difficiles. Elles ont besoin d’un lieu qui regroupera différents services d’accompagnement pour leur permettre de rebâtir leur estime de soi, de retrouver un quotidien qui soit sain et ainsi de réinsérer la société plus fortes et outillées ».

Les victimes d’exploitation sexuelle sont généralement traumatisées par les agressions et les abus verbaux, sexuels ou physiques. Les séquelles sont nombreuses et persistent dans le temps : des problèmes de dépendance, de santé mentale, d’itinérance, d’endettement et différents types de dysfonctionnement. Bien que le portrait de l’exploitation sexuelle au Québec ne soit pas bien documenté, certaines données confirment l’ampleur du phénomène et la réalité de nombreuses victimes. À Montréal seulement, les organismes œuvrant auprès des mineurs qui se prostituent estiment qu’environ 4 000 filles et garçons, âgés de 12 à 25 ans, seraient engagés dans des activités sexuelles commerciales (rapport du vérificateur André Lebon, 2016).

« À 17 ans, j’ai dû quitter la maison familiale et je suis devenue escorte pour subvenir à mes besoins, raconte Chantal, aujourd’hui âgée de 39 ans et bénévole au sein de La Sortie. Je suis finalement sortie de ce milieu à 21 ans parce que ça devenait dégradant, je perdais le respect de moi-même. J’ai réussi à m’en sortir, mais je pense souvent à ces filles qui sont manipulées par les gangs de rues, qui vivent des situations atroces. Quelles sont leurs portes de sorties, où peuvent-elles aller, que deviendront-elles? »

Bien que certaines ressources de soutien et d’hébergement d’urgence soient disponibles, aucun service de logement à moyen terme n’est offert à ces victimes. Une telle ressource viendrait notamment compléter l’offre montréalaise déjà implantée, tels que les refuges, en permettant aux victimes de retrouver leur autonomie et d’acquérir les outils et les compétences nécessaires pour réintégrer plus aisément la société. « Nous faisions déjà beaucoup d’activités de promotion des ressources d’intervention, notamment en logement, ajoute le directeur. On est d’ailleurs toujours en période de financement. On a une résidence qui nous attend, faisant l’objet d’une offre d’achat. Le lancement du projet de recherche signifie l’éclosion de cette maison d’hébergement. »

Le projet de recherche Horizon est mené par le Dr Eric Latimer, PhD., spécialisé dans le développement de modèles en logement pour les personnes vulnérables, chercheur au Centre de recherche de l’Hôpital Douglas et professeur titulaire à l’université McGill. L’équipe de recherche du projet est soutenue par un comité consultatif qui regroupe à ce jour le Conseil du statut de la femme du Québec, Projets Autochtones du Québec, la Maison de Mélanie, le Y des femmes de Montréal et l’organisme La Sortie.