11 février 2022

Logement social et communautaire : privatisation à l’horizon

La nouvelle de la mort du programme AccèsLogis et son remplacement par un programme de logements « abordables » ouvert au secteur privé a eu l’effet d’une bombe en novembre 2021. Le nouveau programme d’aide à la construction de logements abordables, qui a pour objectif déclaré « d’augmenter l’offre d’unités abordables sur le marché privé », risque fort d’avoir des résultats adverses pour les dizaines de milliers de personnes qui cherchent un logement qui répondent à leurs besoins et à leur capacité de payer. [Lire aussi l’article Droit au logement : le privé n’est pas la solution]

Ce véritable détournement des fonds du logement social et communautaire – pourtant sous-financé depuis des années – au profit du privé, alors que la pénurie de logements locatifs et la hausse rapide du coût des loyers frappe les locataires du Québec a suscité à juste titre une levée de boucliers chez les pourvoyeurs de logements sans but lucratif et chez les promoteurs du droit au logement.

Dès l’annonce, cinq regroupements se sont mobilisés pour défendre la place du logement social et communautaire de propriété collective pour résoudre la crise du logement : l’Association des groupes de ressources techniques du Québec, la Confédération québécoise des coopératives d’habitation, la Fédération des locataires d’HLM du Québec, le Front d’action populaire en réaménagement urbain et le RQOH.

Les regroupements ont lancé une campagne sur les réseaux sociaux en partageant un visuel réalisé par le RQOH sous la bannière « Privatisation de l’aide au logement, c’est non ! » et ont fait front commun à l’occasion entre autres du « Grand Forum Habitation Québec » organisé par le ministère des Affaires municipales et de l’Habitation, qui a eu lieu en décembre 2021.

Une lettre commune a également été adressée à la sous-ministre adjointe à l’habitation et au PDG de la SHQ pour exprimer l’insatisfaction de nos regroupements face à l’opacité du processus en cours. La lettre demande entre autres qu’une véritable consultation soit entreprise avec l’ensemble des parties prenantes.

À l’initiative du FRAPRU, plus de 350 lettres ont été adressées au ministre des Finances Eric Girard ou au premier ministre François Legault pour dire non à la privatisation de l’aide au logement et demander qu’AccèsLogis ne soit pas remplacé.

Néanmoins le flou subsiste quant à l’avenir, car le gouvernement lance des signaux contradictoires. En décembre, le député caquiste de la circonscription de Masson, Mathieu Lemay, a dit candidement, au sujet d’AccèsLogis, que « c’est pas mal la fin de ce programme-là » tandis qu’à quelques jours plus tard la ministre Laforest mentionnait que « le programme AccèsLogis est toujours là ».

En cette année électorale et alors que tout indique que la crise du logement se perpétuera et s’aggravera au tournant du mois de juillet, Québec doit corriger le tir sans plus attendre. Le gouvernement de M. Legault doit financer convenablement les 7 000 logements sociaux et communautaires déjà prévus et ajouter dans son prochain budget toutes les sommes requises pour lancer une nouvelle programmation d’AccèsLogis d’au moins 5 000 unités par année.

André Castonguay
Président du Conseil d’administration – RQOH