10 mai 2017
Il y a un an, le Conseil Jeunesse de Montréal a estimé que le logement était un enjeu primordial pour les jeunes Autochtones. Aux yeux du directeur du centre d’amitié Montréal Autochtone, Philipe Tsaronsere Meilleur, il est évident que cette population souffre de discrimination pour l’accès au logement. « Ils sont perçus comme des gens alcooliques, belliqueux et qui cherchent les problèmes, dit-il. Et ils se font refuser des logements. » Le centre d’amitié a donc décidé d’initier un projet de logement abordable destiné à la population autochtone de la région.
« On compte plus de 30 000 Autochtones dans le Grand Montréal, souligne Andréanne Langlois-Côté, chargée de projet logement à Montréal Autochtone. Certains sont de passage ou nouvellement installés, mais d’autres y sont nés ou y résident depuis des années. Et plusieurs jeunes familles et personnes seules vivent en situation précaire. » Les données de Statistique Canada indiquent que les Autochtones sont beaucoup moins souvent propriétaires que les Allochtones. De plus, leurs revenus sont généralement inférieurs, ce qui créé des difficultés supplémentaires pour l’accès au logement. « Ce projet de logement abordable a pour objectif de répondre au mieux à la pénurie de logements sociaux permanents à laquelle ils doivent faire face », précise la chargée de projet.
Montréal Autochtone (Native Montréal) est un centre d’amitié fondé en 2013 qui offre des programmes et des services aux Autochtones vivant dans le Grand Montréal. Cours de langues, de danse, d’artisanat, programme d’insertion à l’emploi ou encore groupe d’action jeunesse, le centre s’attache à faire vivre les cultures autochtones et à soutenir les membres des Premières Nations, les Inuits et les Métis de la métropole.
Dans l’optique de ce projet de logement abordable, l’organisme a sollicité l’analyse-conseil Allan Gaudreault, qui a travaillé par le passé avec le RQOH sur une recherche concernant la viabilité économique des OSBL d’habitation, pour mener une enquête d’évaluation des besoins en logement auprès de ses membres. Effectuée à l’aide d’un sondage en ligne et de groupes de discussion, l’enquête, débutée au mois d’octobre 2016, a permis de rejoindre une centaine de personnes. Le centre d’amitié a également rencontré différents organismes s’adressant notamment à un public autochtone. Un événement de consultation pour les membres a été organisé, comprenant des ateliers sur les ressources existantes en logement social ou encore sur l’accès à la propriété. Il a fait l’objet d’un reportage vidéo en anglais d’APTN, le réseau de télévision des peuples Autochtones du Canada, qui illustre notamment les discriminations et le racisme que peuvent subir les membres des Premières Nations, les Inuits, et les Métis, pour trouver un logement.
À ces recherches s’ajoute une synthèse des meilleures pratiques de logement, regroupant autant des initiatives autochtones au Québec et au Canada, que des projets s’adressant à des populations aux problématiques comparables à Montréal. « Nous sommes très inspirés par le projet Kijaté, porté par le centre d’amitié autochtone de Val-d’Or, souligne Mme Langlois-Côté, et nous souhaitons développer un projet semblable pour la population montréalaise. » Les futurs locataires du projet Kijaté devraient emménager durant l’automne 2017.
Membre du Regroupement des centres d’amitié autochtones du Québec (RCAAQ) et de l’Association nationale des centres d’amitiés (ANCA), Montréal Autochtone peut compter sur le soutien d’un maillage de centres d’amitié à travers le Canada, ce qui lui permet de trouver l’inspiration pour le projet montréalais. Les centres d’amitié entretiennent une approche culturellement pertinente et sécurisante, qui prend en compte les contextes historiques, économiques, politiques, juridiques, sociaux et communautaires dans lesquels se trouvent les Autochtones. Aussi, l’organisme montréalais prévoit prendre en charge l’ensemble des services de soutien communautaire en logement social, comme c’est d’ailleurs le cas pour le projet Kijaté de Val-d’Or.
Le centre d’amitié est conscient qu’il peut être difficile de ne pas se heurter au syndrome du « pas dans ma cour » que rencontrent de telles initiatives : « Nous avons observé les difficultés auxquelles des projets comparables au nôtre se sont heurtés, et nous souhaitons éviter ces écueils. » Le centre est ainsi accompagné par le groupe de ressources techniques Bâtir son Quartier, et pourra également compter sur le soutien de la FOHM pour s’installer dans le paysage du logement communautaire montréalais.