La ministre des Finances Crystia Freeland a présenté hier l’énoncé économique automnal du gouvernement fédéral. Le logement y occupe une place de choix, mais les nouveaux engagements annoncés demeurent modestes, eu égard à l’ampleur de la crise et à l’urgence d’intervenir avec des mesures fortes pour soutenir les ménages en difficulté.
Globalement, l’approche du gouvernement fédéral vise d’abord à augmenter l’offre. Certes, une partie de la réponse à la crise se trouve dans l’augmentation du nombre de logements disponibles (dans le marché locatif, les taux d’inoccupation ont rarement été aussi bas qu’ils le sont actuellement), mais ce n’est pas tout : on construira quoi, comment et pour qui?
Jusqu’à maintenant, les programmes mis en œuvre dans le cadre de la Stratégie nationale sur le logement ont beaucoup appuyé le développement du logement à but lucratif, alors que le marché est totalement déséquilibré et souffre de la faiblesse du logement hors marché, sans but lucratif et non spéculatif.
Parmi les mesures annoncées hier, l’initiative appelée « Financement de la construction de logements locatifs » change de nom et devient le Programme de prêts pour la construction d’appartements. Il s’agit du programme qui offre des prêts à taux avantageux aux promoteurs qui s’engagent à inclure quelques logements dits abordables dans leurs projets (« abordables » comme ces logements à 2 200 $ par mois qui ont été construits il y a trois ans à Laval…). Le programme obtiendra un financement supplémentaire de 15 milliards $ en financement de prêts à compter de 2025-2026 et devrait, selon toute probabilité, continuer à servir le secteur privé à profit.
L’énoncé économique contient par ailleurs une bonne nouvelle, alors que le programme phare de la stratégie fédérale (le Fonds national de co-investissement), désormais appelé le Fonds pour le logement abordable, sera maintenant réservé au logement communautaire (OSBL, coopératives ou logement public) : le secteur privé à but lucratif n’y aura plus accès. Un financement supplémentaire de 1 milliard de dollars sur trois ans y est alloué, mais seulement à compter de 2025-2026, ce qui est très peu. On prévoit avec cette somme la construction de 7 000 nouveaux logements d’ici 2028, pour tout le pays!
La nouvelle orientation conférée à ce programme, qui offrira désormais des subventions plutôt que des prêts, répond en partie aux demandes formulées par plusieurs, dont la défenseure fédérale du logement, qui plaidaient pour une réorientation de la stratégie fédérale vers le logement social et communautaire.
Dans le même esprit, l’énoncé économique prévoit aussi un financement additionnel de 309 millions $ pour le programme de développement de coopératives d’habitation qui avait été annoncé dans le budget 2022, mais dont on attend toujours, cela dit, la mise en œuvre.
Le RQOH aurait souhaité que des mesures plus fortes et susceptibles de donner des résultats plus rapides soient incluses dans cette mise à jour budgétaire, comme une phase 4 de l’Initiative pour la création rapide de logements – le programme qui a le mieux fonctionné et donné les meilleurs résultats jusqu’à maintenant – et la création d’un fonds pour appuyer la socialisation de logements du marché privé par des OSBL afin de les soustraire du marché spéculatif et d’en préserver l’abordabilité à long terme. Espérons que le prochain budget régulier du gouvernement fédéral, en mars ou avril, contiendra des annonces plus ambitieuses qui iront dans cette direction!
Le Plan d’action canadien pour le logement du ministère des Finances du Canada peut être consulté en ligne : https://www.canada.ca/fr/ministere-finances/nouvelles/2023/11/plan-daction-canadien-pour-le-logement.html