Claudine Laurin, directrice générale. Fédération des OSBL d’habitation de Montréal

En septembre dernier, une commission parlementaire concernant la certification pour les résidences pour personnes âgées se tenait. Plusieurs groupes se sont fait entendre, mais peu d’entre eux se disaient en désaccord avec cette Loi. Au contraire, certains trouvaient qu’elle n’allait pas assez loin, d’autres félicitaient le gouvernement. A contrario, la FOHM et le RQOH soulevaient l’incohérence et le danger d’une certification pour personnes âgées autonomes.

Fait surprenant et questionnant pour beaucoup, les représentations étaient faites par des associations de retraités qui, soulignons-le, sont bien souvent près ou dépassés quelque peu les 65 ans, âge d’entrée de la vieillesse pour la Loi. Or, ces personnes n’avaient rien de vulnérable tout comme ceux et celles qui habitent dans les OSBL d’habitation. Est-ce à dire que la vulnérabilité que l’on parle ici en est une de milieu ou de classe sociale ? Si vous demeurez dans votre maison ou votre condo, vous pouvez ne pas être vulnérable, mais si vous avez vendu votre condo ou votre maison ou encore avez quitté un logement devenu trop grand pour vous et que vous vous retrouvez dans un OSBL, vous êtes alors vulnérable. Comment comprendre cette loi et sa logique dans un tel contexte ?

La vulnérabilité n’est pas fonction d’âge, mais bien de conditions : beaucoup de parlementaires, médecins, avocats ou consultants ont dépassé cet âge critique de 65 ans et pourtant, la société ne cesse de les interpeler.

Le respect de la personne âgée ne passe pas par la certification

Il faut bien comprendre que la fermeture de places en CHSLD et le manque de places en Ressources intermédiaires sont davantage problématiques dans notre cas. La certification n’a en ce sens rien réglé vis-à-vis des services aux personnes âgées. Nous nous retrouvons toujours avec les mêmes problèmes. Il n’est pas rare de voir, parmi nos locataires, des personnes qui devraient avoir des services, mais qui malheureusement, n’obtiennent aucune réponse si nous n’exerçons pas des pressions telles que des menaces d’expulsion, par exemple.

Disons-le, il y a négligence au niveau des services et cela ne relève aucunement de nos organisations.

À vouloir prévenir les abus, les outils que nous  tentons de mettre en place sont peut-être  également porteurs d’abus : abus de prise en charge  ainsi que négation du droit à l’autonomie et du respect  de la vie privée, etc.

Un développement institutionnel ou communautaire ?

Au niveau du développement, ce dernier est  encore une fois fait de façon institutionnelle et  non centrée sur la personne. La vision que nous  avons comme société sur la personne âgée n’est  pas cohérente et est souvent fonction des  événements liés à l’actualité. D’ailleurs,  toute la Loi sur la certification a eu comme  trame de fonds tous les incidents et accidents  décriés et avec raison dans les résidences qui,  disons-le, relevaient pour beaucoup du privé.

Lorsque nous développons des résidences pour personnes âgées autonomes ou en légère perte d’autonomie, nous avons pensé le développement en fonction de leur possible incapacité à venir. Cette façon de concevoir le développement oblige les organismes à un exercice de rentabilisation faisant en sorte de rendre captifs les locataires. Nous pouvons, donc, nous retrouver avec certains projets qui dû au faible nombre d’unités se développe sans qu’aucune cuisine ne soit intégrée dans les unités. Au même moment, on se retrouve avec une politique du vieillir chez soi. Il aurait été peut-être préférable de regarder l’ensemble des solutions à ce problème, et voir si nous ne pouvions pas trouver réponse à ce besoin qui se situe de façon individuelle plutôt que d’y apporter une réponse institutionnelle par la création d’un service.

Il est intéressant de voir ce qu’ont dit les aînées au niveau du comité sur l’habitation en lien avec la démarche de Villes amies des ainés. Ces travaux ont été colligés par Mme Suzanne Garon, PHD, chercheuse principale et Catherine Bigonnesse étudiante à la maitrise en service social et assistance de recherche (Projet VADA recherche sur le vieillissement du Centre de service de santé et services sociaux – université en gériatrie de Sherbrooke).

Les principales préoccupations étaient :

  • « Est-ce que je peux me le payer et pour combien de temps ? »
  • « On aimerait bien avoir des résidences où l’on peut se loger à prix abordable. »
  • « Je veux vivre avec des gens plus jeunes, avec des gens mariés et ainsi de suite. Je veux vivre dans une société. Et une société, ce n’est pas juste le troisième âge. »
  • « … il y a une question que je trouve importante, parce qu’on est âgés, on dirait qu’ils veulent nous mettre dans tellement petit (…) Mais pourquoi ? On veut respirer comme tout le monde. »

Il est également ressorti de ce projet pilote que les personnes âgées désirent demeurer le plus longtemps possible dans des habitations normatives et intégrées dans la communauté.

L’attribution de logements subventionnés ne nous permet pas d’octroyer un quatre pièces et demie à un couple à moins d’avis médical, nous comprenons difficilement pourquoi nous ne développons pas plus de quatre et demie tout comme les personnes l’ont souligné au niveau du projet VADA.

En terminant soulignons qu’il nous reste bien du travail à faire pour changer notre vision du vieillir et éviter, une fois pour toutes, cette prise en charge et cette normalisation que nous nous faisons de la vieillesse. Elle se transige de manière individuelle et nous nous devons de respecter cette individualité.

Article paru dans le bulletin Le Réseau no 40

Lisez notre dossier Cetification des résidences aînés