Isabelle Leduc, présidente. Réseau québécois des OSBL d’habitation

Depuis plus d’un an, l’univers du logement et de l’hébergement pour les personnes âgées subit des changements majeurs au Québec. Ces changements ne sont pas sans rappeler les enjeux qui entourent le processus de désinstitutionnalisation entamé depuis quelques décennies en santé mentale.
Certes, le principe du « vieillir chez soi » est louable, tout comme l’est celui du maintien dans la communauté de personnes éprouvant des problèmes de santé mentale. Pour ces dernières, le problème était et reste encore aujourd’hui le manque d’investissement dans les ressources et services dans la communauté. La diminution considérable des places en CHSLD pour les personnes en perte d’autonomie liée au vieillissement qui passe par le resserrement des critères d’admissibilité dans ces ressources entraîne des enjeux très similaires et crée des pressions sur divers milieux, incluant celui du logement social.
Les investissements dans les services de maintien à domicile ne s’ajustent pas à la réalité qu’entraîne ce virage dans la communauté pour les personnes âgées, et le MSSS se tourne vers le privé pour assumer de lourdes responsabilités pour ce qui est des soins pour les personnes en perte importante d’autonomie. Mais le fait que « privé » rime plus souvent qu’autrement avec « recherche de profit » entraîne de lourdes conséquences lorsqu’il s’agit d’assurer confort et dignité à des êtres humains, particulièrement aux moins bien nantis. Le principal moyen mis en place par l’État pour minimiser l’impact de cette recherche de profit sur le bien-être de personnes souvent très vulnérables est la certification des résidences. Ainsi, des OSBL d’habitation originalement destinés à des personnes âgées autonomes, mais désirant un milieu de vie communautaire dans des projets de logements adéquats et financièrement accessibles, subissent des pressions afin de se conformer à une certification qui confère des responsabilités en terme de soins à la personne et donc des investissements importants en ressources humaines (c.-à-d. présence 24/7) sans assurer quelque financement que ce soit.
Ainsi, plutôt que d’investir dans les services de maintien à domicile qui sont sous la responsabilité du réseau de la santé, qui est le mieux placé pour rémunérer adéquatement et encadrer des soins et services professionnels, on cherche à refiler ces lourdes responsabilités au milieu communautaire, voire à l’ensemble des locataires.
Pour plusieurs OSBL d’habitation pour aînés, la certification viendrait dénaturer l’aspect communautaire et autonome de leurs milieux de vie en imposant à l’ensemble des locataires des normes destinées à pallier la perte d’autonomie et le retrait de l’État. De plus, il s’agirait d’une perte importante pour les aînés à faible ou modeste revenus en quête de logements adéquats et abordables.
Nous sommes tout à fait d’accord avec la volonté de respecter le désir des aînés à demeurer dans leurs milieux naturels, mais, qu’il s’agisse de personnes vivant dans leur propriété, leur logement privé ou leur logement social, il en revient au réseau de la santé de leur assurer les services que leur maintien à domicile requiert.

Article paru dans le bulletin Le Réseau no 40

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